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Metal and Oddities Reviews
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23 janvier 2016

SHOW ME WOLVES - Between Man, God And False Idols

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Progressive Black - Islande - 6 Août 2015 - 8 titres – 40 minutes 

L'Islande, c'est joli, mais c'est froid. Et il faut une certaine discipline mentale pour en apprécier la rigueur climatique, les paysages uniformes. Néanmoins ce cadre peut être propice à une forme de création en solitaire, misanthropique évidemment, et donc se présenter comme le terreau de glace indispensable à la pousse d'une végétation mort-née, qui trouvera sa floraison dans la désolation d'une expression extrême non dénuée de beauté.

C'est certainement ce que doit penser l'homme derrière le projet SHOW ME WOLVES, qui si l'on en juge par sa musique, a du en croiser un ou deux dans sa vie, voire sympathiser avec eux. Derrière ce nom en guise de requête se cache un projet en solo de Hördur Ledviksson (un prénom difficile à porter dans nos contrées), musicien originaire du nord de l'Islande, depuis relocalisé à  Reykjavik. Hördur est ce qu'on pourrait appeler une figure de l'underground Islandais, puisqu'on le retrouvait partie des ensembles OFFERINGS ou PROVOKE, mais aussi en tant que guitariste pour les GRIT TEETH, qui pratiquent un gros Hardcore mâtiné de Grind. 

Ici, la violence est aussi prédominante, mais sous une autre forme. Pas moins intense pour autant, mais trouvant plus son essence dans un Black Métal ambitieux, qui ne se contente pas d'effleurer la surface et de respecter les codes, mais qui puise aussi son inspiration ailleurs, dans le Death évidemment, mais aussi le Heavy mélodique, et qui traite le tout sous un angle très progressif. La trame est évidemment classique, et laisse de longs morceaux étirer leurs idées, mais l'abondance et la variété de celles ci autorisent une écoute tout confort, qui réussit à surprendre tout autant qu'elle convainc. Hördur s'est chargé de tous les instruments, des textes et de la composition évidemment, mais son talent naturel en tant que praticien lui permet de mettre en place des parties tout à fait honorables d'un point de vue technique, et le projet ne souffre jamais d'une autarcie déplacée. On retrouve même la participation au chant sur trois morceaux de Jon Mar Asbjornsson, seul intervenant extérieur, comme quoi, l'homme est quand même partageur dans un sens.

Ce qu'il partage avant tout, c'est son amour pour une forme de musique extrême très ouverte, qui injecte de superbes mélodies à des rythmiques puissantes ("False Beings", qui se fraie un chemin au travers du Black, du Heavy, et même du Doom), et qui ne tombe jamais dans le piège des automatismes parfois trop flagrants dans le Black. 

Sans pour autant se révéler unique, cet album est assez surprenant par son aspect musical très prononcé, et son goût pour les changements de direction. On passe allègrement d'une charge toute en blasts ("Amongst Us"), à une jolie variante d'un Black Pagan presque Folk dans les parfums ("Sea Of Trees", qui soudain se mue en tempête Raw dévastatrice), mais à dire vrai, chaque morceau s'avère construit sur une évolution logique qui brasse une somme d'influences assez importante. Il est évident que le musicien à souhaité nous ouvrir son univers parfois très antinomique, mais fascinant dans le fond et la forme, et qu'il s'est basé sur sa propre expérience personnelle pour nous offrir une image musicale le représentant assez fidèlement. 

Les titres partagés avec Jon sont très ouverts, et se partagent entre le chant clair et harmonieux et les accélérations soudaines plus symptomatiques du Black épique en vogue dans les pays nordiques à la fin des nineties, mais le mariage des deux timbres dessine les contours d'un univers de feu et de glace assez troublant. Ce qui n'empêche nullement notre homme de se réfugier parfois aux confins d'un Black Death très opaque et véhément ("Steps Into Oblivion"), qui écrase quelques riffs aux syncopes étranges et éructe des vocaux agonisants de haine.

En toute fin de parcours, il arrive encore à nous surprendre d'un flou absolument Heavy, qui rappelle le BATHORY des années 90, avec cette guitare directement influencée par la NWOBHM malmenée par une ambiance délétère à la HELLHAMMER, que le maître à penser colore de large coups de pinceaux mélodiques. "Beyond The Sun", révèle au grand jour toute l'ambition de SHOW ME WOLVES en se permettant des associations contre nature entre Black des origines, très abrasif, et Heavy progressif et mélodique, parfois presque technique dans son déroulement, et enchaîne les plans à grande vitesse sans perdre de vue la cohésion. 

C'est d'ailleurs sur un morceau au titre qui résume à merveille l'affaire que Hördur termine son projet, "From Ice To Fire", qui accentue encore plus la violence sous jacente en la portant à un paroxysme indéniable, sans pour autant tuer dans l'oeuf ces velléités mélodiques qui le caractérisent. Un album chaud comme des harmonies Heavy progressives s'échappant de la glace, chaud comme les Hadès d'un Black sans concessions, une ambivalence qui captive, et qui nous fait danser sur des charbons ardents tout en nous aspergeant d'eau glacée. Ce qui aurait pu n'être qu'un projet anecdotique d'un obscur musicien Islandais est devenu en fin de compte un album très solide, qui pourrait symboliser le départ d'une nouvelle aventure que l'on se plaira à suivre si elle connaît d'autres chapitres. 

Il n'est donc pas interdit d'être Islandais, d'aimer la solitude, et d'être pourtant très généreux musicalement parlant. C'est un peu la leçon à tirer de ce Between Man, God And False Idols, qui privilégie l'humain, sans l'ériger en Dieu, et qui pourfend le proverbial veau d'or.

Gageons que les loups reconnaissent l'odeur de ceux qui leur ressemblent. C'est sans doute pour ça qu'ils ont depuis longtemps accepté Hördur au sein de leur meute. 

 

 

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