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Metal and Oddities Reviews
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22 mai 2016

ZYGOMA - The Highest Court

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Extreme Progressive Metal - Belgique - 17 Mai 2016 - 8 titres – 53 minutes

Imaginez. Vous ne connaissez pas le truc, et on vous vend un album dit « Progressif », sur la base d’un nom, d’une pochette, et d’une nationalité. Vous regardez le graphisme, vous lisez le nom, vous savez que ça vient de Belgique, et aussitôt, vous dissertez mentalement avant d’avoir écouté la moindre note. Vous pensez à une musique complexe, dérivée de KING CRIMSON, YES, hautement abstraite mais puissante et mélodique. Vous ne pouvez pas vous tromper, le nom et l’artwork vous ont déjà tout dit. Puis, vous passez enfin l’objet en question.

Et là, vous comprenez en quelques secondes à quel point vous avez fait fausse route avant même d’avoir fait le moindre pas. 

C’est exactement ce qui m’est arrivé lorsque j’ai choisi de chroniquer le second LP des Belges de ZYGOMA. ZYGOMAtiques? Oui, les muscles faciaux sont en effet stimulés, mais pourtant, l’opération ne fera rire personne. Elle pourra à la rigueur impressionner, époustoufler, inquiéter, rendre circonspect, mais en aucun cas elle ne fera sourire. 

Mis à part de plaisir, un peu sadique.

 

ZYGOMA, c’est un quatuor (Eben – chant, Jonas – basse, Gert – batterie et Kenzo – guitare) qui a eu beaucoup de mal à se stabiliser, au point de splitter une première fois en 2010. Mais les musiciens ont insisté, jusqu’à pouvoir sortir un premier effort il y a trois ans, The Forgotten, au nom absolument pas prédestiné puisqu’une fois qu’on les a écoutés, on ne les oublie jamais. Conçu au départ comme un simple ensemble vouant un culte au Dieu Death Metal, ZYGOMA a évolué au gré des modifications de sa structure en groupe « progressif », mais en donnant un sens très particulier à ce terme si galvaudé.

Je lui préfèrerai donc l’appellation « évolutive », beaucoup plus en phase avec son optique musicale pour le moins absconse. 

The Highest Court.

 

Que s’y passe-il donc?  Des choses très bizarres, qui s’expliquent plus ou moins en prenant pour base une trame Death évidemment, déviante forcément, mais hautement déformée par une musicalité qui ne rechigne pas à aller chercher son feeling du côté du revival de Canterburry des ENCHANT, Neal MORSE et autres Steven Wilson quand il le faut, sans tomber dans les mêmes travers de systématismes. Si je m’abandonnais à la facilité, je pourrais vous dire que la démarche de ZYGOMA trouve son plus parfait résumé dans le morceau éponyme, qui pendant plus de huit minutes aborde tous les aspects techniques et émotionnels. Death très carré et pointu, longs passages contemplatifs, mélodies en contrepoint, accélérations foudroyantes, guitares qui s’en donnent à cœur joie, en arpèges ou staccato millimétré, chant grave et rauque, polyrythmie parfois indéchiffrable, et tension crescendo, brisée en plein vol par des délires Art-Rock irrésistibles.

Mais tout ça serait trop simple, et franchement réducteur. Pourtant, au sein d’un même morceau, les Belges parviennent à évoquer les univers de Zappa, de Ponty, de Strapping Young Lad, Morbid Angel, Suffocation et même Atheist. Sans jamais paraphraser l’un d’entre eux.

Et tout ça, en un seul titre.

Alors imaginez-vous le reste de l’album…

 

Cet album justement, introduit ses composantes avec patience. En tant qu’intro, « The Fingerprint », comme une empreinte papillaire découverte sur le lieu du crime, donne des indices cruciaux, sans pour autant trop en dire. Une mise en place lente et montante, le long de guitares profondes qui s’incrustent dans un tempo martial et lourd, pendant que le chant investit les lieux, pas encore menaçant, mais déjà ferme. Et lorsque cette initiation s’enchaîne sans temps mort sur le compact « Enslaved », le tableau révèle un peu plus de détails. Le Death Metal commence à laisser des traces plus visibles, même si la machine n’a pas encore atteint son régime.

On sent déjà les secousses de cette basse aussi vibrante que libre, les boursouflures de la rythmique qui dès le départ n’accepte aucune entrave, et la polyphonie de lignes vocales se complétant aussi bien qu’elles ne s’opposent. 

Les morceaux, longs, sont pourtant captivants. Ils peuvent aussi se montrer oppressants, puisque construits comme des souffles épiques qui entrent en collision, créant de fait d’énormes dépressions. Ainsi, les huit nouvelles minutes de « Villain Of The Piece », tout en reprenant les transferts d’influences du morceau précédent, font évoluer les choses, les densifient, et finalement, se placent au carrefour des styles, Death évidemment, mais aussi Black dans ces soudaines coulées de blasts et d’arabesques de guitare, de Metal cyclique et redondant, de Psychédélisme agressif…J’en passe, et des plus enfouis dans l’inconscient.

Pas de shunt, pas de silence, l’avancée se fait sans pause, et les titres s’enchaînent sans temps mort, mais sans précipitation.

ZYGOMA n’impose pas ses idées, il les présente et laisse l’auditeur faire son choix dans l’interprétation. Ainsi, « Red Curtain Falls » oppose les espaces positifs et négatifs, vidant presque complètement les premiers pour remplir à ras bords les seconds. L’intensité monte d’un cran, tandis que les respirations profitent de plus de vide pour proposer un nouveau souffle, tandis que la basse suit une partition de plus en plus folle au fur et à mesure que les guitares ploient sous le poids des dissonances. On atteint des sommets dans l’absurde à l’occasion d’un break Ragga et pourtant…rien de choquant, puisque tout peut arriver par définition. 

Si « Lysergide » reste en chemin balisé, « Sequence » défriche encore plus de terrain, voit les lignes de chant s’affoler dans un délire Hardcore, la basse s’aventurer à quelques interventions en slap, et l’ensemble tenter le plus court chemin entre DREAM THEATER et SUFFOCATION, mine de rien. Comme si tout ça était la chose la plus naturelle.

 

Et « Decoder », malgré son titre, ne décode absolument rien. Encore un long dédale de plus de huit minutes, qui a le mérite d’accentuer toutes les exagérations précédentes, de casser encore plus les mesures, d’empiler les plans comme des peaux de bête, et de complexifier, de mâtifier, pour laisser sur une impression de chaos total. Les prouesses techniques sont encore plus flagrantes, les arrangements plus incongrus, et les trouvailles plus originales, et finalement on se dit que si MESHUGGAH et Devin TOWNSEND avaient fait équipe avec Steven WILSON… 

Ah. 

Et si on restait sur cette fausse question ?

 

 

 

 

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