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Metal and Oddities Reviews
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10 août 2016

ANNA PEST - Forlorn

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Black Metal - Canada - 4 Aout 2016 - 8 titres – 38 minutes

April Hutchins aka Anna PEST est visiblement une artiste éclectique, c’est le moins que l’on puisse dire. Cette musicienne Canadienne est passionnée par le Hard Rock et le Métal, et se montre sous un jour extrêmement versatile depuis ses débuts…Saurait-on lui reprocher ceci ou cela ? Certainement pas, puisqu’elle démontre une ouverture d’esprit manifeste qui en ces temps de cloisonnement créatif fait plaisir à voir et à entendre. Anna offre donc à ses fans potentiels plusieurs visages, au travers de covers qu’elle publie sur Youtube (Foo Fighters, Enigma, Ace Of Base, Eiffel 65, t.A.t.u…), mais aussi de réalisations personnelles, comme ce premier EP Transmission, publié un peu plus tôt dans l’année… 

Une fois de plus, il me faut reconnaître que je ne connaissais pas l’artiste. Il faut dire que sa page Facebook a un rayonnement plutôt confidentiel, et de plus, il m’est impossible de passer des nuits entières sur la toile pour y débusquer tous les jeunes artistes amateurs dignes d’intérêt. Alors une fois de plus, c’est la pochette qui a attiré mon attention.

April s’y montre relativement dévêtue, dans une attitude assez passive qui n’a rien de sensuel, pour un cliché assez cru qui frappe l’œil.

 

Et finalement, cette photo que beaucoup trouveront racoleuse est en fait parfaitement adaptée au contenu de son nouvel exercice de style. Puisque en effet, elle annonce un virage à 180 degrés, et une mise à nue artistique validée par cet artwork qui garde quand même de la décence sous le coude. 

Donc, après avoir goûté à la reprise Pop-Rock, après s’être épanchée musicalement dans un univers assez soft et mélodique, Anna PEST s’est décidée à se livrer corps et âme au monde obscur du Black Metal, sans arrière-pensée, par passion. Elle s’est donc constitué un répertoire, a joué de tous les instruments, enregistré aux Muffin Studios de Montréal, et sort donc cette première œuvre intégrale que vous pouvez vous procurer sur son Bandcamp pour la modique somme de quatre dollars Canadiens. Si l’on en croit le petit laïus qui accompagne cette sortie, elle s’est influencé du travail de groupes/artistes comme SILENCER, DARK FORTRESS ou AGALLOCH, et a parcouru toutes les arcanes du BM moderne, du plus dru et âpre, au plus atmosphérique et contemplatif. En résulte un album attachant, certes grandement imparfait, mais qui fait montre de belles qualités et d’une maîtrise instrumentale assez fascinante. 

Il serait assez facile de dresser un parallèle entre Anna et MYRKUR, en se basant sur quelques critères superficiels, mais après écoute, vous constaterez de vous-même que ce parallèle est mort avant d’avoir été couché sur papier. Musicalement, les deux artistes sont à l’opposé l’une de l’autre, et à la rigueur, c’est tant mieux. Le BM d’ANNA PEST est beaucoup plus cru et basique que celui de sa consœur Danoise, tout en gardant une accroche mélodique indéniable.

Ce qui est assez remarquable dans cette tentative de s’extraire de son univers habituel, c’est cet investissement dont personne ne peut remettre en cause la sincérité. Anna joue bien, chante dans un registre écorché tout à fait classique, compose des morceaux simples mais efficaces, qui laissent toutefois de temps à autres transpercer des atmosphères assez prenantes et envoutantes.

 

Il n’est pas rare d’avoir des références précises en tête lorsqu’on écoute ses morceaux, « Only » évoquant par exemple un savant mélange entre le meilleur BATHORY et le EMPEROR le moins orchestral, tandis que « Samuelle » laisse transparaitre des couleurs atones largement utilisées par OPETH, avant de partir en vrille dans un déluge de blasts électroniques furieux. Mélodies, bourrasques de violence, Forlorn se permet toutes les dérives sans pour autant que sa cohésion n’en pâtisse. Certes, des éléments de çà et là auraient pu être peaufinés, mais le son global est plutôt bon quoiqu’un peu trop compressé, et les morceaux assez soignés, comme l’interprétation qui est de qualité. 

La jolie Canadienne sait mettre en place des ambiances, et faire le lien avec son passé, lorsque l’harmonie et la sécheresse s’unissent dans un ballet de nuit assez éthéré (« Forevermore », l’un des meilleurs morceaux de l’ensemble), et n’hésite pas à se dévoiler sous un jour plus progressif et ambitieux lors de la longue suite « Nyctophobic » qui nous enroule dans un tapis de nuit se déroulant d’arpèges lumineux et d’harmonies de guitare cotonneuses. 

Concision et variations, tels sont les maîtres mots de cette réalisation. Anna est aussi à l’aise dans la violence la plus ouverte que dans la nuance la plus offerte, et signe même des titres qui pourraient aisément en remontrer à bien des références du genre (le très efficace « Asmodeus »). La variation des tempi est coulante, les transitions travaillées et logiques, c’est en définitive du bon travail qui pourrait faire croire aux auditeurs potentiels qu’Anna a toujours évolué dans ce milieu musical. 

Comme elle le dit elle-même, il est la preuve de son ouverture d’esprit et destiné à des personnes qui ne refusent pas la diversité. Je l’ai pris en tant que tel et apprécié, et il ne serait pas étonnant que l’artiste ne dévoile un nouveau visage lors de son prochain album, ce qui en fait une des artistes les plus imprévisibles de l’underground Canadien actuel.

Mais faites-vous votre propre idée. Anna/April mérite amplement l’attention que vous pourrez lui porter et certainement pas à cause de cette pochette, mais bien d’un point de vue musical. Il y a bien des façons de se dévêtir.

Et exposer son âme est bien plus complexe qu’exposer sa chair.

 

 

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