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Metal and Oddities Reviews
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4 septembre 2016

UNYIELDING LOVE - The Sweat of Augury

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Sentient Ruin Laboratories - Blackened NoiseGrind - Irlande - 30 Septembre 2016 - 8 titres – 20 minutes

Il y a des gens qui ont du goût. C’est inné que voulez-vous, ils ne cherchent pas forcément l’omniscience, mais la trouvent de par leur nature. Mes amis de Sentient Ruin Laboratories font partie de cette caste rare, mais n’en tirent aucune gloire. Mis à part celle de faire leur travail avec toujours plus de conviction et de passion, et de fait, de proposer des sorties toujours aussi dignes de leur réputation. Ainsi, ce matin, j’ai retrouvé un de leurs mails, qui me proposait de traiter du cas Ô combien à part des Irlandais de UNYIELDING LOVE, qui en une petite vingtaine de minutes, ont quelque peu bousculé ma conception de l’extrême extrême.

Redondant?

Non, juste explicite.

 

Pour me déstabiliser, le label de la mythique Bay Area est allé traquer la bête en Irlande du Nord, du côté de Belfast, et la chasse fut très bonne si je me fie à la réaction médusée de mon système auditif. Les UNYIELDING LOVE y pratiquent l’art de la torture sonore depuis quelques années, suffisamment pour être au point et proposer un EP qui les rapproche dangereusement des figures les plus essentielles du genre. Il est d’ailleurs assez ardu de les classer avec précision, puisque les lutins noisy fricotent avec tout ce que l’art bruitiste peut proposer de plus abrasif, et passent allègrement d’un Noisecore vraiment brûlant à un Grind étouffant, sans pour autant négliger quelques attaques Harsh absolument irritantes.

Pour les situer, il suffirait de presque rien, certainement pas quelques années de moins, mais en citant quelques noms qui partagent avec eux des vues sur le non-sens mélodique. Ainsi, celui qui vient le plus facilement à l’esprit reste FULL OF HELL, puisque les Irlandais parviennent même à synthétiser dans le même effort leur collaboration contemporaine avec MERZBOW, au sein d’un seul format. 

Leur label se permet même des allusions plutôt bien senties avec les incontournables GNAW THEIR TONGUES, NAILS (quoique dans ce cas-là, le degré d’intensité penche cruellement en faveur des Irlandais), COLUMN OF HEAVEN ou SUTEKH HEXEN. Argument promotionnel choc peut-être, mais tout ça à le mérite de nous mettre sur la bonne piste, quoique suivre celle proposée par le cheminement de The Sweat of Augury soit subtilement déviante et pas forcément linéaire.

Augury, dans un français clair, c’est une sorte de « signe de ce que le futur nous réserve, comme une malédiction ». Cette traduction a le mérite de nous prévenir quant au contenu de cet EP en question, qui s’il se pose en présent d’un avenir pas encore dessiné, a de quoi nous glacer le sang. Doit-on y voir une certaine forme de futur de la musique extrême ? Si tel est le cas, beaucoup y perdront leur latin qu’ils n’ont jamais vraiment compris, et risqueront de fuir à grandes enjambées devant le tableau noir dépeint.

 

The Sweat of Augury fonctionne effectivement comme un très mauvais présage. Construit de façon évolutive pour nous emmener vers une vérité qu’on ne souhaite pas universelle, il propose en hors d’œuvre une poignée de titres courts et immédiats, tous aussi féroces les uns que les autres. Puis l’inéluctable destin se dessine enfin plus clairement, sous la forme de deux morceaux terminaux de plus de cinq minutes, qui semblent compléter un puzzle sordide élaboré par des âmes noires comme de la poix. Pour les amateurs de Noisy Core, l’analogie avec le séminal Full Of hell & Merzbow sera une d’une évidence lénifiante. On retrouve en effet sur les deux œuvres le même sens de la provocation bruitiste, les mêmes fulgurances intempestives, la même surutilisation du feedback, et ces lignes vocales qui se superposent dans un ballet frénétique et fort peu empathique.

Non que les Irlandais s’adonnent au mimétisme, mais ils partagent avec leurs homologues les mêmes tendances à la liberté d’expression Noise qu’ils ne brident en aucun cas, frisant parfois le Harsh Noise à la Japonaise (« Of Human Grease and Ash », qui porte aussi les stigmates profonds de riffs Death fabuleusement glauques), et mettant un pied dans l’abime du chaos sans pourtant y chuter. 

Et lorsqu’on pensait le modus operandi clair et net, UNYIELDING LOVE rompt avec la clarté d’une linéarité d’apparence pour lâcher des arpèges électriques inquiétant annonciateurs d’un final pour le moins troublant. Ainsi, « The Pregnant Hurt » paraît aplanir les aspérités et se concentrer sur un Post Hardcore somme toute assez paisible, avant de nous secouer une fois de plus de poussées de violence presque insupportables et insoutenables en l’état. La clôture éponyme ne fait rien pour dissiper le malaise, et se repose sur des percussions tribales éparses, charcutées par des larsens et autres dissonances symptomatiques du Post Black le plus nihiliste. Le tout monte en crescendo cauchemardesque, et se termine dans une acmé de terreur qui s’interrompt brutalement, nous laissant avec peu de certitudes et beaucoup de questions.

Mais souhaitons-nous vraiment en avoir les réponses ? 

Il est certain que ce premier EP se rapproche de très près des travaux les plus essentiels des originaires du Maryland de FULL OF HELL, mais beaucoup plus qu’un sosie, l’entité UNYIELDING LOVE se conçoit plutôt comme une personnalité complémentaire qui va même peut-être encore plus loin.   

Mais au-delà de ces considérations, The Sweat of Augury reste une expérience éprouvante pour les nerfs, avec son terrible mélange de Grind de la pénombre et de Post Noise d’outre-tombe.

L’avenir nous dira si les prédictions se réaliseront.

 

Mais au cas où, attendez-vous au pire. Qui est déjà là, à attendre.   

 

 

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