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Metal and Oddities Reviews
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13 septembre 2016

WOUND MAN - Perimeter

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Painkiller Records - Violent Chaoscore Sludge - USA - 1er Juillet 2016 - 9 titres – 28 minutes

Je lis des noms qui ont un effet immédiat sur moi. Tenez, prenez ceux de MIND ERASER ou BREATHING FIRE par exemple. A peine prononcés, et voilà mon attention captivée. Subjectif, un peu puérile, mais c’est comme ça. Alors si en plus de les lire, j’apprends qu’ils sont associés au sein d’un même projet, je deviens fasciné. Et par extension, fasciné par un ensemble assez étrange dans la forme, WOUND MAN. WOUND MAN est justement né de l’association de ces deux références, et entamé comme un projet annexe, devenu un groupe à part entière. C’est en tout cas ce que nous précise la mini bio du Bandcamp officiel du groupe, qui prend aussi soin de préciser que tous leurs enregistrements se font sur quatre pistes cassette.

Délire vintage ou réelle passion pour les techniques d’antan, peu importe puisque seul le résultat compte. Et celui-ci est probant, déroutant, et de dimensions multiples.
Alors ça, plus le reste, A+B, l’équation commence à salement me plaire d’autant plus que je n’ai pas à en trouver la solution. Juste à en analyser les conséquences possibles. 

Leur label, Painkiller Records les décrit volontiers comme un mélange d’accélérations fatales et de Sludge oppressant. Si d’ordinaire ce genre de petit laïus commercial n’est destiné qu’à gonfler le potentiel d’un groupe pour vendre des rondelles, dans le cas des WOUND MAN, il est pertinent, et surtout d’une grande honnêteté. Car c’est exactement ce qui vous attend tout au long des neuf pistes de ce LP qui s’amuse vraiment beaucoup à nous filer la nausée par ses sautes d’humeur.

Alors, dans le genre dilatation/compression, il est certain qu’on a rarement fait mieux. Les Américains du Massachusetts dérivent entre Crust/Powervilence maladif et tendu et Sludge dru et ventru, et la route qu’ils nous font suivre est truffée de nids de poule, de dénivellations, de côtes essoufflantes, de faux plats, et autres erreurs de construction qui mettent à mal notre organisme auditif et nerveux.

 

A l’aise dans les deux registres, l’ambivalence et la schizophrénie affichées sont de mauvais augure, mais de bon ton pour tous les amateurs d’extrême. Si les noms déjà cités de MIND ERASER et BREATHING FIRE ne vous ont pas déjà aiguillé sur le bon parcours, Perimeter le fera sans attendre et délimitera justement un terrain de jeu assez vaste, mais contraignant dans l’exploration. Il vous faudra être capable d’encaisser de brutaux changements de pression, sans que votre estomac ne reste au sol. Et croyez-moi, la chose ne sera pas facile.

 

Le schéma proposé est simple. Une succession de morceaux longs et brefs, des pics d’intensité dans la violence, des emphases sur la lourdeur et la douleur, et une jolie suite de creux et de bosses qu’on ne franchit qu’au prix d’un effort surhumain. Les WOUND MAN enfoncent leurs doigts crochus dans nos plaies et jouent le jeu du sadisme musical poussé à son paroxysme, en confrontant la force brute du Hardcore le plus violent à l’oppression du Sludge le plus pesant.

Ils pratiquent l’art de la déstabilisation parfois au sein du même morceau, comme le montre très bien l’ouverture assez directe « 29A », qui étale leurs intentions sans rien cacher de leur vilénie musicale. Mais leur Sludge qui parfois s’apparente à un Doom vraiment maladif, leur Hardcore qui frise en plus d’une occurrence le Death primal des AUTOPSY et consorts font que ce mélange à un goût vraiment étrange en bouche. Et comme ils ne rechignent pas à sombrer dans les coups d’éclair Grind sans pitié avant de retomber lourdement sur leurs pattes Sludge (« Sick », en effet, ces gens-là ne vont vraiment pas bien du tout), vous comprendrez que Perimeter est tout sauf unidimensionnel, et qu’il vous veut tout sauf du bien. 

Sauf si vous vous souhaitez à vous-même tout le mal du monde.

 

Un son très compressé et moite, une basse uberdistordue qui vous colle du sel sur les plaies encore béantes, une rythmique qui soudain piquée au vif augmente la cadence plus que de raison avant de tomber dans une apathie fétide (« Dredge »), et puis des aventures hors du commun sur des landes embrumées qui collent les miquettes même aux plus endurcis d’entre vous. Le cauchemar est total, est se transforme même en rêve éveillé lors du long intermède terminal « Perimeter », qui laisse traîner de çà et là des accès de feedback strident, avant de prophétiser la guérison par l’aliénation lourde. Les riffs macabres dessinent un périmètre bien délimité, qui se complaît dans des ombres Death se projetant sur une terre aride Sludge, tandis que notre narrateur du jour exhorte les mots à jaillir d’une gorge malmenée, au point de rappeler les pires déviances du Black dépressif sans jamais y tomber totalement. 

Sludge Black ? Un morceau comme « Mute » pourrait justifier cette double exposition contre nature, mais ses fréquentes poussées de fièvres Darkcore entrent en contradiction avec ce postulat, tout en gardant en ligne de mire le seul objectif avoué du combo, mettre mal à l’aise, quoiqu’il en coûte. On pense parfois à un gros cocktail létal entre les NAILS, MIND ERASER, SILENCER et TORCHE, ce qui vous en dit long sur l’état d’enivrement dans lequel Perimeter va vous plonger. D’autant plus que le Massachusetts vous réserve une sortie morbide de toute laideur, qui se concrétise dans un dernier souffle qui appuie bien sur le thorax (« Extinction »), fonctionnant comme le miroir parfait de l’intro «29A ». Cette symétrie dans la véhémence est assez révélatrice en soi, mais lorsque les mecs lâchent enfin un riff mémorisable sur fond de mid tempo accrocheur, on se perd en conjectures en se demandant quel sort nous sera réservé à l’avenir. 

Bref. Le présent étant ce qu’il est, tentez l’expérience WOUND MAN. Que vous soyez fan de Sludge, de Hardcore, de Powerviolence ou autre excroissance extrême, Perimeter pourra s’adresser à vous. Extrêmement lourd et très rapide, glauque et poisseux, violent et abrasif, c’est un LP qui vous tord les boyaux et vous met les tripes de l’âme à l’air.

Le mal par le mal pour le mal. Pas mal comme prescription. Mais ne vous attendez pas à cicatriser. Ce truc laisse des traces indélébiles sur la chair et dans la mémoire.

 

 

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