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Metal and Oddities Reviews
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3 septembre 2015

DEVOURING GHOST - Soundtrack

a3883563627_10Youth Attack - Raw Progressive Black - USA - 17 Avril 2015 - 9 Titres, 40 Minutes

 

Allez, les vacances sont terminées, la reprise est là, il faut redevenir studieux...Le temps d'émerger d'un coma post farniente, de hanter le net pour trouver une sortie digne d'un entrefilet ou plus, et la machine repart, comme si cette parenthèse n'avait jamais eu lieu. Pour reprendre le rythme, je ne pouvais pas me contenter d'une anecdotique production. Il me fallait quelque chose de plus consistant, qui me donnerait envie d'y consacrer quelques signes. Après tout, aujourd'hui étant un jour férié, je n'allais pas me lever pour n'importe qui/quoi. Et le destin faisant bien les choses, j'ai fini par trouver la base d'une analyse qui pourrait s'avérer intéressante.

Je m'intéresserai aujourd'hui au cas d'un artiste hors norme, protéiforme et productif, qui laisse depuis des années une emprunte profonde dans plusieurs secteurs artistiques, comme la bande du Flexus ou celle de la Factory il y a quelques décennies. Mark McCoy est un quadra fringant, né dans l'Illinois, à Waukegan plus exactement. Il a usé les bancs de la Northern Illinois University, avant de décrocher un Master of Fine Arts à la prestigieuse School Of Visual Arts New-Yorkaise. Graphiste de talent, il a signé trois recueils, dont le mémorable "When I Die Bury Me In The Clothes of My Youth", au titre aussi sombre que son design. Mais loin de se contenter de manier le fusain ou le pinceau, l'homme se consacre aussi à la musique, dans un créneau aussi violent et perturbant que son oeuvre graphique. Figure de l'underground Powerviolence, Hardcore et Black, il a laissé derrière lui une palette musicale encore plus large que son travail originel, ce qui a fait de lui un artiste unique, que je vous propose de découvrir aujourd'hui. On dit qu'avant lui, le Hardcore n'était qu'un jet de semence à peine digne d'un Emo. Même si cette affirmation semble un peu péremptoire, il faut avouer que ses saillies musicales sont pour le moins chaotiques et hermétiques.

Depuis le 18 avril, se tient au WELTKUNSTZIMMER (un centre artistique consacré à différents arts, visuels, performances et musicaux) une exposition de McCoy, intitulée DEVOURING GHOST, dont Soundtrack se veut la bande son fidèle. L'artiste a en effet souhaité accompagner chacune de ses oeuvres par une pièce musicale unique, qui décrirait par des sons ce que les traits ont défini initialement. Ces pièces musicales sont rassemblées dans un coffret majestueux, découpé en deux vinyles, accompagnés de neuf cartes imprimées des neuf tableaux présentés par l'auteur. Vous n'êtes certes pas obligé d'acquérir le coffret en question, limité à cent exemplaires assez onéreux, mais je vous engage par contre à vous intéresser à la musique qu'il contient.    

Une fois de plus, McCoy à choisi un courant extrême pour s'exprimer, un de ceux qu'il affectionne le plus, le Black Métal. Loin des délires Powerviolence dont il est coutumier (quoique le bonhomme est si versatile que sa production pléthorique prend des allures d'hommage bruitiste à Zappa, par le volume s'entend), McCoy a choisi cette fois ci de se lancer dans une opération de révérence aux origines du mal noir, et paie son tribut au Black âpre, sombre, nihiliste et cru des années 90, à tel point qu'on a parfois le sentiment d'écouter la suite directe de De Mysteriis Dom Sathanas de MAYHEM. Il est certain que l'écoute de Soundtrack doit prendre une autre dimension lorsqu'elle s'accompagne de la vision des oeuvres picturales qu'elle décrit. Il n'en reste pas moins que prises en tant qu'entités indépendantes, elles dégagent toutes un charme vénéneux et poisseux, et que l'ensemble possède une tonalité envoûtante indéniable qui nous ramène sur les côtes nordiques d'il y a plus de vingt ans.

Mêmes riffs aux mélodies amères, en circonvolutions, même rythmique un peu étouffée, même chant acide et aigu qui vrille les tympans, le mimétisme est impressionnant, et on en vient même à douter des origines US du bonhomme tant l'hommage est parfait. La qualité des morceaux, très homogène (il faut quand même préciser que les thèmes sont assez similaires d'un morceau à l'autre) confère à l'album une aura particulière, et on finit par l'écouter comme un conte macabre, conquit par ces tonalités ténébreuses. Les deux morceaux les plus longs ("Trail Severed Grain" et "Land Of Shade") sont mis en avant par leur structure intrinsèque qui se permet un peu plus de digressions et cassures, mais les deux intermèdes plus brefs ("Eye Socket" et "Solar Cauldron"), misant sur une atmosphère délétère et déliquescente sont tout aussi délicieux, et aèrent l'album d'un souffle rauque et étouffant, paradoxe qui n'a rien d'étonnant quand on connaît le travail de Mark...J'aurais vraiment aimé pouvoir écouter cette musique dans son contexte, pour pouvoir m'imprégner du sens premier que l'artiste a voulu y insuffler. Pouvoir regarder ses tableaux prendre vie/mort sous les coups de boutoir de cette musique violente et sans concession, mélodique mais sans issue réelle, agressive mais atténuée par une volonté d'expression concrète.

Néanmoins, Soundtrack, même isolé de son cadre reste un disque de Black Métal originel d'excellente facture, joué par un musicien sincère. Dans une époque où le créneau est saturé de poseurs et de copieurs sans vergogne, c'est une façon de voyager dans le temps et dans le psyché d'un artiste unique qui n'a pas fini de nous étonner de ses choix et de ses inclinaisons artistiques.

Et si vous avez eu la chance d'avoir pu voir de vos yeux cette exposition (elle sera retirée après demain), je vous envie.

Vous avez sans doute pu comprendre bien mieux que moi les desseins obscurs de leur auteur.

 

 

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