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Metal and Oddities Reviews
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7 novembre 2015

PASKURA - Myriad Eyes

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Handshake Records - Progressive Post Metal - Russie - 13 Octobre 2015 - 8 titres – 34 minutes 

Un groupe de la Fédération Russe signé sur un label Chinois, c'est assez inhabituel. Les  DA du label le remarquent d'ailleurs, et affirment que tout ce qu'ils ont entendu provenant de Russie se cantonne (no pun inside) à du Post Rock ou des morceaux instrumentaux. Je pense qu'ils n'ont pas du assez fouiller, ou qu'ils se sont bornés à leur champ d'action habituel. En tout cas, Handshake Records, bravo et belle découverte que ce second album des Russes de PASKURA. Car après un premier départ encore un peu hésitant, Spika, ce Myriad Eyes fait montre de bien des progrès dans les mélodies, les structures et la composition. Plus aventureux, plus puissant, plus affirmé, en totale adéquation avec son concept. 

Lequel? Celui d'un homme perdu au centre d'une forêt de regards, qui symbolise la perte de repères face à une société toujours plus confuse. Pochette sobre et parfaite, thème intéressant, mais surtout musique riche, à la hauteur des ambitions, dotée d'une production un peu tapie et étouffée assez bien choisie. 

PASKURA, ce sont Alexey Mikhalev (basse, chant), Alexander Tchikine (guitare), Andrey Komov (guitare, claviers), Yan Shevchenko (guitare) et Andrey Shavyrin (batterie), unis sous la bannière d'un Post Rock progressif aux fortes teintes Métal. Chacun dispose d'un bagage technique largement suffisant pour explorer toutes les pistes du genre, et leur musique est pour le moins étrange. Elle exhale un parfum un peu nostalgique et hivernal, sans pour autant céder à la contemplation triste, mais fascine par ses harmonies sombres et sa mélancolie puissante. 

Arpèges de cristal, riffs appuyés, rythmique souple et serpentine, je ne vois guère que ce chant si particulier pour rebuter un auditeur potentiel. Il faut en effet un temps d'adaptation pour bien assimiler les tonalités et le grain de voix d'Alexey, qui reste la plupart du temps dans un registre médium, sans tomber dans les tics suraigus de ses frères d'armes progressifs. Mais le melting pot d'influences est assez intrigant, et aide à faire passer ces vocaux pour l'accompagnement sobre qu'ils sont. On trouve de tout sur Myriad Eyes, même de l'Alternatif des années 90, un peu du FATES WARNING des 80's, pas mal de Post Rock Indie et éthéré, et même parfois un brin de Post Punk jovial, comme sur ce surprenant "Cave Song", qui se déguise de l'ironie du BLUR de "Song #2" et du trouble courant de SHIHAD. 

Versatile, épanoui mais recentré, cet album est une grosse surprise ne le nions pas. C'est une façon d'accommoder l'énergie du Rock, l'expérimentation du Post, et la rugosité du Métal sans trop s'y tremper les mains, en assemblant des parties d'une façon coulée, tout en développant une approche personnelle. Il n'est bien sur pas question de Métal progressif stricto sensu, mais plus d'un puzzle stylistique qui pose des bases novatrices, et qui traite les éléments de façon globale et poussée. 

Le quintette cite A PERFECT CIRCLE, TOOL, KING CRIMSON, THE MARS VOLTA, mais ne semble pourtant pas partager leur univers torturé. Le label quant à lui évoque les DEFTONES, ISIS, et même ALICE IN CHAINS, mais ne semble pas plus dans le vrai. En fait, si le tout est homogène, chaque segment à sa patte, et touche autant au Rock Progressif à tendance Métal, version WASTEFALL en plus abrasif et direct '("Everlasting", belle accroche), qu'au Post Rock tendance Hardcore ("Jamais"), ou au progressif alternatif le plus direct ("Catatonic Scale", à la rythmique indécise et aux guitares volubiles et parfois proches de DEP). 

Les Russes se permettent même un final assez troublant, à la lisière du Shoegaze et de la Dream Pop, avec accents traditionnels slaves inclus ("Mt.", comme une brume matinale). Ils n'en oublient pas pour autant de se déclasser volontairement en sinuant entre plusieurs chemins traversant une forêt Post Rock plantée d'arbres en pleine pousse Rock Progressif ("Naked Trees", étrange et opaque, mais robuste comme un chêne centenaire). 

En gros vous l'aurez compris, il est assez difficile de situer PASKURA, et c'est voulu, n'en doutez pas. Mais leur musique, si elle se compose de détails un peu disparates est cohérente, logique et surtout fascinante dans son approche un peu résignée, parsemée de mélodies amères, de parties techniques affirmées mais pertinentes. En fait ce non choix les laisse libres, et nous aussi de fait, libres d'y entendre ce qu'on veut, sans pour autant occulter leur créativité qui fait du bien en ces temps de standardisation. 

Myriad Eyes est un album hors du temps, à la beauté irréelle, qui revisite à sa façon quelques années d'histoire musicologique, et prouve de fait (à son label même), que la Russie n'est pas que la patrie du Post Rock, de l'Instrumental, ou du Hardcore sans concession.

Un beau pied de nez aux conventions, et une grosse demie heure de périple en abandon.  

 

 

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