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Metal and Oddities Reviews
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25 novembre 2015

KREMATORIUM - Body Bags

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Thrash - Croatie - 4 Octobre 2015 - 8 titres – 50 minutes 

Vous le savez, depuis quelques années lorsqu'il s'agit d'aborder le cas du renouveau Thrash qui s'abreuve directement à la source des années 80, c'est toujours bibi qui s'y colle. Non par défaut, mais par choix, parce que j'adore ça, parce que cette musique, je la vis depuis 1985, que c'est elle qui m'a tiré vers les musiques extrêmes, et bla, et bla...Alors à chaque fois qu'un nouvel album revival sort, je suis là à mon poste. D'où qu'il vienne, du Chili, d'Allemagne, d'Angleterre, du Kamtchatka, ou...de Croatie. Je suis peut être bon public, pas forcément objectif, mais j'exige quand même un minimum d'idées. Car si certains s'en sortent haut la main dans leur entreprise d'hommage réactualisé, d'autres s'embourbent dans un plagiat plus ou moins prononcé qui me frustre et me rend amer. 

C'est rarement le cas, je le concède. Et ça ne le sera pas plus aujourd'hui qu'hier, puisque une fois de plus, je vais dire du bien d'un album rangé dans ce créneau, et même plus que du bien. Car les Croates de KREMATORIUM ont réussi avec leur premier album à me replonger direct dans un bain de jouvence saccadé et efficace qui a illuminé ma fin de journée.

Fondé selon la bio en 2007 mais en 2009 (où sont passées ces deux années?), KREMATORIUM tourne dans le circuit habituel des clubs de Rijeka, et un peu partout où ils peuvent dans le pays, en compagnie d'autres groupes du cru. Ils sortent une première démo en 2009, Without Fucking Remorse, qui par son titre définit très bien leur démarche, puis une seconde deux ans plus tard, Evil Is Released, qui elle aussi porte bien son nom. Et nous y voilà donc, quarante huit mois après, arrivés à l'épreuve du premier album tant attendu, qui n'est rien de moins qu'une très grosse révélation Thrash Vintage, peut être même celle de l'année. 

Sorti en complète autoproduction, Body Bags est un condensé intelligent et raffiné de tout ce que le Thrash à pu proposer de meilleur depuis son émergence. Puissance, mais aussi mélodie, agression mais aussi harmonie, vélocité, mais aussi Heavy, en gros, tout ce qu'on attend d'un album du genre qui sort largement la tête et les épaules de l'océan des suiveurs passables en proie à une noyade assurée. Et enrobés dans une gigantesque production qui parvient à équilibrer tous les éléments inhérents au made in Bay Area, délocalisé en Croatie, ces huit morceaux parviennent à convaincre sans effort, en s'inspirant de la crème tout en restituant un dessert personnel. Mettons les choses au point tout de go, Body Bags est inhabituel dans sa forme. Avec seulement huit morceaux pour plus de cinquante minutes de musique, KREMATORIUM a pris un gros risque, mais à gagné son pari haut la main. Même lorsque ceux ci dépassent allégrement les sept minutes, la lassitude ne vous gagne jamais tant le quintette a soigné chaque plan aux petits oignons. Thrash jusqu'au bout des ongles, bien sur, mais aussi Hardcore dans les choeurs entonnés collégialement, Heavy lorsque l'effort en dépend, KREMATORIUM privilégie l'exercice de longue haleine, mais en profite aussi pour lâcher deux bombes concentrées. "Fury", qui rappelle autant FORBIDDEN que BULLDOZER ou AT WAR, et le lapidaire "Faces Od Death" qui cavale à bonne allure et soumet aux souvenir le spectre de SDI et DESTRUCTION. 

Pour le reste, c'est plus complexe, sans devenir prise de tête. Les Croates n'ont pas choisi la facilité, et ne le cachent pas. Dès "Elections", les débats s'animent de plusieurs arguments, et s'enrichissent considérablement en confrontant le Thrash, le Heavy, le Hardcore en un ballet furieux et incroyablement puissant. Puissant, c'est exactement ce qui définit le mieux les contours de ce premier morceau épique, qui navigue à vue entre Thrash médium écrasant et Heavy boosté à la boisson énergétique. Riff redondant à la PANTERA sur le couplet, refrain en mode "seuls contre tous", c'est un monstre d'efficacité qui relègue les collègues loin derrière.

"Body Bags", morceau éponyme utilise les délicates harmonies d'une intro à la TESTAMENT, agrémentée d'un solo de toute beauté, avant de rentrer de plein pied dans une diatribe velue et Heavy. Et même si la rythmique suit une ligne bien définie, même si les plans durent, jamais l'ennui ne s'installe, et ça, c'est très bon signe. Il est vrai que lorsqu'on travaille une bonne idée, le résultat est là, et le talent du quintette est justement de broder autour d'une idée fédératrice, proposant ainsi une légère progression qui laisse quand même le thème initial grandir en paix. 

Saluons d'ailleurs le travail des deux guitaristes, aussi efficaces dans leurs riffs que précis dans leurs soli, et qui dynamisent de leurs petites trouvailles des titres déjà bien accrocheurs à la base. Sans trop rentrer dans les détails, sachez quand même quelques trucs. "Judge and Oppressor" taille dans le gras et accélère le tempo, tout en permettant à la basse de prendre un peu plus de place. Il alterne de plus les BPM, oscillant entre up et médium, avant d'accélérer modérément, tout en gardant en focale ce riff épais et gluant qui lui sert de carburant. Le chant de Domagoj Fišeković évolue même entre les extrêmes, empruntant à Paul Baloff ses cris de vieille sorcière avant de retomber dans les intonations graves qui lui sont plus foncièrement caractéristiques. "Silent Death" recycle avec flair un riff à la Alex Skolnick, avant de prendre quelques libertés rythmiques, et accumule les parties sans jamais renoncer à la mélodie. "Fight The Future" frappe fort et vite, pour un up tempo diabolique, et "Theodore R Bundy", outre ses samples en relation avec l'histoire et le procès de ce charmant jeune homme termine l'album en beauté en se permettant encore de lâcher de nouvelles idées, propulsées par une batterie rouleau compresseur.          

Body Bags pourrait être l'emballage plastique contenant les cadavres des combos sans idées qui se contentent de refourguer des plans déjà usés depuis longtemps. Et KREMATORIUM le four ou l'on fera flamber les timorés qui ont cru qu'une nostalgie facile et factice suffirait à convaincre de leur bonne foi. Mais plus simplement, les deux pourraient juste symboliser une flamme qui brûle depuis plus de trente ans, et que les vents des modes n'ont jamais réussi à éteindre.

Jouer du Thrash, c'est facile, jouer du Thrash inspiré, fin et puissant, peut être la chose la plus difficile du monde. 

Pourtant, KREMATORIUM y est parvenu sans difficulté. Du coup, leur premier album ressemble plus à une boite de Pandore qu'à un vulgaire sac à cadavres...

 

 

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