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Metal and Oddities Reviews
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10 janvier 2016

ASHEN HORDE - Nine Plagues

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Mandol Records - Progressive Black - USA - 15 Décembre 2015 - 9 titres – 52 minutes 

Il n'est pas interdit de pratiquer un style extrême ou radical ET d'être ambitieux. C'est en quelque sorte la leçon donnée par les Américains d'ASHEN HORDE, qui non contents de pratiquer un Black/Death progressif tout à fait élaboré, se permettent en plus de l'enrichir d'une histoire en forme de concept horrifique. En tant qu'anglophones potentiels, vous jugerez vous même du potentiel dramatique de l'histoire concoctée par Trevor Portz, qui en seul maître à bord à décidé de se lancer dans une narration assez intéressante.

Mais je peux vous en exposer les grandes lignes après tout je suis aussi là pour ça...

L'histoire de Nine Plagues est assez simple en soi. Elle brosse le tableau d'un petit village qui se retrouve confronté à une invasion le plongeant dans un hiver éternel et désolé, hiver qui cache un certain nombre de "plaies" ou malédictions qui vont frapper les habitants un à un. 

Vous avez dit "Winter is coming"? 

Vous avez en partie raison. 

Il est vrai que tout ça ressemble un peu à une des trames de fond de Game Of Thrones, mais je ne m'en plaindrai pas, puisque la musique d'ASHEN HORDE est tout aussi ambitieuse que l'oeuvre de G. Martin. D'ailleurs, les points de comparaison sont notables, et multiples. Violence, variation des ambiances, sensation de souffle épique qui s'en dégage, les deux "auteurs" semblent partager le même goût pour des légendes qui s'imposent par leur grandeur et la complexité de leur intrigue. Et tous les deux semblent préférer le travail en solitaire, ce qui ne les empêche pas de publier des oeuvres fouillées et captivantes, sans l'aide de personne. 

Mais là ou le taciturne écrivain s'agite de sa plume, le misanthrope Américain fait feu de tout bois, et compose, produit et surtout, interprète tous les personnages de sa saga musicale. Et il faut avouer qu'il s'en tire avec un brio indéniable. 

Nine Plagues, c'est en quelque sorte la grandiloquence du Black passé au prisme du traitement progressif. Le concepteur nous explique qu'il a tiré son inspiration de quelques grands anciens, comme ENSLAVED, IMMORTAL, BORKNAGAR ou FINSTERFORST,  mais on pourrait aussi faire allusion à MORBID ANGEL pour ces constructions techniques qui se percutent dans un fracas Death énorme, ou même NOCTURNUS, MAYHEM pourquoi pas, tout en gardant une vision plus directe de la violence instrumentale. Cet album est dense, ne le cachons pas. Trevor n'a pas choisi la facilité, mais il ne fait pas non plus preuve d'un quelconque pêché de vantardise. Chaque note est justifiée, chaque plan plus ou moins expliqué dans sa logique, et l'oeuvre globale est intense, et passionnante puisqu'il faut bien lâcher le mot.   

Comme tout concept qui se respecte, chaque piste raconte une partie de l'histoire générale, et donc s'adapte au ton. Ne vous attendez donc pas à un déferlement de haine ininterrompu, l'homme s'est adapté à son conte et a repris des méthodes éprouvées à son compte. Sur une ligne de fond Black, il a brodé des éléments Heavy, mais à surtout soigné sa technique pour ne pas donner l'impression d'en faire trop et nous perdre en route. Nine Plagues est épique, dans le sens le plus noble du terme, constitué d'un nombre impressionnant de sous couches qui forment une fois assemblées une texture très riche, et ce, que les titres soient développés ou plus concis. D'ailleurs, Trevor entame et clôture son travail par deux morceaux tout à fait libres, qui dépassent les huit et neuf minutes, et réussit le pari de les garder captivantes et riches tout du long, ce qui n'est pas une moindre performance. Difficile à croire à leur écoute qu'il est seul à tout faire... 

On appelle ça l'autodiscipline, et dans le cas de Portz, ça se confine même à l'ascétisme. Le tout paraît d'un naturel désarmant, comme si les structures lui étaient venues le plus naturellement du monde, dans une logique progressive qu'il n'avait plus qu'à respecter. C'est bien sur très puissant, comme tout album de Black qui se respecte, mais même si la plupart des morceaux sont extrêmement compacts, il n'a pas pour autant oublié d'aérer le tout de quelques parties harmoniques bienvenues. 

Pour respecter son travail, je me suis interdit de parler des titres en eux mêmes, puisqu'il faut écouter Nine Plagues dans son intégralité pour s'immerger dans l'histoire littéraire et musicale. Si "Desecration Of The Sanctuary" et "A Reversal of Misfortune" sont les deux pièces maîtresses de ce LP, par leur complexité pourtant facilement assimilable, tous les morceaux sont de valeur, et imbriquent des parties presque opératiques dans des dédales rythmiques parfois assez abrupts ou au contraire difficiles d'accès. L'occultisme diffus d'IMMORTAL première période, assimilé au paganisme de BORKNAGAR, avec cette volonté d'équilibre technique qu'on retrouvait chez le MORBID ANGEL le plus décidé, voilà de quoi résumer en gros l'entreprise, mais bien sur, seule la musique en elle même peut trouver sa véritable portée. 

En tout cas, tout ceci laisse admiratif. Nine Plagues est un livre à écouter de toute beauté, froid comme un hiver sans fin bien sur, mais constamment perturbé par des menaces tangibles, qu'on discerne avec difficulté. Plus simplement, comme Trevor est à l'aise avec tous ses instruments, et qu'il dispose en plus d'un potentiel de création énorme, il n'est pas difficile de comprendre que cet album est une tuerie intégrale. Violent, tendu, pluri directionnel, envoûtant et captivant, un peu comme l'album qu'un tandem imaginaire MORBID ANGEL/MAYHEM n'aurait jamais pu enregistrer. C'est un compliment, assurément, mais à vrai dire Nine Plagues n'en a pas besoin. 

Il se suffit à lui même en tant que preuve d'un talent éclatant qui n'attend que vous pour traverser les épreuves qu'un vent glacial rend encore plus effrayantes.     

 

 

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