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Metal and Oddities Reviews
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17 février 2016

SLABDRAGGER - Rise Of The Dawncrusher

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Holy Roar Records - Sludgecore - UK - 26 Février 2016 - 5 titres – 61 minutes

Depuis l'émergence de la scène NOLA durant les mid 90's, et la découverte par une frange du public et de musiciens de tarés notoires comme EYEHATEGOD ou CROWBAR, certains allumés se sont dit qu'il serait de fort bon ton d'agrémenter la lourdeur du Doom d'une bonne grosse louche de Hardcore sale et rural. Mais si les deux groupes sus mentionnés étaient déjà au fait de cette possibilité depuis longtemps, ils avaient la décence de le faire au sein de structures compactes et de morceaux plutôt concis. D'autres n'ont pas eu cette politesse, et de fait, un nouveau genre émergea, le Sludge, sorte d'hybride monstrueux entre le Doom du SAB' et du Hardcore sudiste qui a oublié depuis longtemps l'usage de la brosse à dents et du savon.

Et puis, les choses suivant leur cours et la théorie de la dévolution s'imposant de fait, d'autres ont poussé le concept encore plus loin, accentuant la puissance et laissant déborder la violence, sur des durées toujours plus longues, pour aboutir à ce que l'on peut nommer aujourd'hui le Sludgecore, qui peut sans problème se poser en acmé d'une recherche de pesanteur agressive incompressible... 

Et à ce petit jeu de dénaturation à outrance, la rivalité prend aujourd'hui des proportions dantesques, chacun cherchant à repousser toujours plus loin les frontières de l'emphase. Depuis 2010, cette partie de bluff a vu l'entrée en lice d'un concurrent fort dangereux, qui pour une fois ne vient ni des USA ni d'Europe de l'Est, mais bien de Londres. L'Angleterre à donc décidé de se prêter à l'exercice de l'écrasement global, et autant le dire de suite, son poulain à de sérieuses chances de s'imposer à la table des cadors du genre.

Déjà responsables d'un premier album il y a presque cinq ans, Regress qui portait diablement bien son nom, le trio SLABDRAGGER ( Yusuf Tary - basse et chant, Sam Thredder - guitare et chant, Jack Newnham - batterie) récidive après avoir consacré trois longues années à la préparation de son retour, et nous révèle enfin la teneur de la suite de ses aventures fort peu empathiques, sous la forme d'un LP de cinq titres, à l'intitulé qui une fois de plus ne joue pas le double sens. Et sous une pochette relativement peu discrète se cache en effet une galette qui n'a pour unique but que d'annihiler l'aube naissante à grands coups de rythmiques au marteau pilon, de hurlements stridents déchirant le silence, et de riffs de basse/guitare qui feraient passer les pires crises de misanthropie de Tony Iommi pour un léger énervement matinal. 

J'ai la chance d'ignorer les sensations éprouvées lors de l'impact d'une énorme masse sur une boîte crânienne. Certainement au fait de ce détail, les trois Londoniens ont donc décidé de m'en donner un aperçu avec leur second LP qui doit peu ou prou provoquer la même désagréable sensation d'os qui craquent et explosent sous la pression. Si l'on connaît les tenants et aboutissants du Sludgecore depuis longtemps maintenant, il semblerait que ces trois timbrés avides de torture lancinante aient décidé d'aller un peu plus loin que leurs homologues. En nous réservant le délice de quatre compositions s'étirant largement au delà des dix minutes, ils se sont fait un petit plaisir, et avouons le de suite, le plaisir est partagé.

Pour avoir une vague idée de ce qui vous attend à l'écoute de Rise Of The Dawncrusher, il suffit de regarder attentivement sa pochette. Les titres sont en effet des transpositions musicales de cette machine de destruction massive qui semble vouloir annihiler notre belle planète, et la réduire à feu et à sang de ses gerbes de flammes aux proportions grotesques. 

D'ailleurs, la puissance développée par SLABDRAGGER est en parfaite adéquation avec cette description picturale, et rarement son aura été aussi gras, et au service de riffs aussi épais et plombés. Pour beaucoup d'entre vous, la souffrance sera concrète. Et le sadisme des musiciens devient patent lors de l'intermède "Evacuate!", qui en tant que up tempo légèrement isolé dans une masse grouillante de Heavy aussi lourd qu'un matin de mise en terre, se pose en ironie majeure. Un peu comme si le trio vous prévenait avec un sourire malsain aux lèvres qu'il est temps pour vous de refermer la porte avant que le long triptyque final ne vous enserre de son linceul. Mais bien évidemment, comme tout inconscient qui se respecte, vous irez forcément plus loin, et ça, les Londoniens le savent très bien. 

D'ailleurs, ils ont de fait tissé une toile qui vous prend dans ses fils, en développant une longue suite progressive à tous les niveaux.

Le trois derniers titres de cet album non seulement évoluent selon un schéma musical bien précis, mais voient leur durée augmenter au fur et à mesure pour finalement friser les vingt minutes à l'occasion de "Implosion Rites", qui usera la patience et le système nerveux des plus endurants d'entre vous. Intro massive portée par une guitare qui se traîne d'un riff bluesy épuisé, percussions qui commencent à faire résonner leur colère, et puis la longue litanie commence à prendre forme...Chant plus volontiers mélodique, Sludge qui écrase tout sur son passage et occulte la lumière, et qui se concentre sur un ou deux thèmes porteurs qu'il développe au delà de toute mesure. Pour beaucoup, ce dernier sursaut sera la goutte de poison qui fera déborder la fiole, mais pour les plus accros, il représentera l'apogée d'un style qui ne se conçoit que dans l'excès, et jugeront cette ultime intervention comme une séance d'hypnose impossible par annihilation des sens. 

Mais les SLABDRAGGER ne sont pas pour autant des fumistes cachant un manque d'idées patent derrière un vaste écran de fumée. Leurs morceaux sont certes interminables, mais tous supportés par une ambiance forte, et truffés d'idées certes parfois discrètes, mais notables. Ainsi, la première partie de "Dawncrusher Rising" s'essaie à l'exercice périlleux du Sludge mâtiné de Noise Indus dissonant, et provoque de fait un énorme chaos sonore, avant de substituer quelques exhalations Funeral Doom aux habituels pilonnages Sludge.

La longue introduction de "Shrine Of Debauchery" rappelle les plus longues et déchirantes plaintes d'ISIS ou NEUROSIS, avant une fois de plus de dépasser toutes les convenances en termes de lourdeur massive, striée de larsens et de stridences purement Core. C'est douloureux, mais quelque part, cathartique dans son réalisme outrancier...Et cette mélodie fantomatique qui perturbe à peine le silence à mi parcours... 

Mais la réponse est bien là, sous vos yeux, si tant est que vous la cherchiez. Cette pochette. Ce titre. Tout est dit, et rien ne devrait surprendre. Et pourtant, SLABDRAGGER y parvient. En accentuant tout, la gravité et la déprime des guitares. L'apoplexie du chant. La démence des rythmiques pas si statiques que ça.

Mais il faut aimer avoir mal pour se faire du bien parfois. Et puis, il est possible de concevoir tout ça comme une nouvelle extension effrayante. Le Massive Sludgecore. Ce qui sonne plutôt pas mal. Mais nous ferons peut être moins les malins lorsque cette machine de cauchemar apparaîtra à l'aube, un jour, demain peut être. Parce qu'après constatation de ses effets destructeurs, je ne vois pas très bien ce qui pourrait nous en protéger. 

 

 

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