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Metal and Oddities Reviews
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10 décembre 2015

KILLING JOKE - Pylon

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Spinefarm Records / Universal - Killing Joke - UK - 23 Octobre 2015 - 10 titres – 57 minutes 

Il y a les blagues de reprise de contact, celles de fin de repas, quand tout le monde est fatigué, les blagues carambar qui font pleurer de honte, les blagues racistes, sexistes, celles qui font mal et puis il y a les blagues létales.

L'avantage, en musique, c'est qu'il est impossible de les confondre avec les autres, puisqu'il n'en existe qu'une. 

KILLING JOKE. 

Formation, 1978. Premier album éponyme, 1980. Retrouvailles du line up d'origine, 2008, en lâchant un dernier au revoir à Paul Raven. Et allez, Coleman, Walker, Glover et Ferguson, embarqués dans la même galère encore une fois, sauf que depuis trente et quelques années, les choses ont changé, mais pas eux. Ils ont repris du service sur Absolute Dissident, rempilé pour MMXII, et aujourd'hui, arrive la clôture de cette trilogie, sous la forme d'un LP d'une heure pour dix morceaux, Pylon. 

Ceux qui les ont vu en festival cet été ne se sont pas trompés. Même de jour, sans les lights, sans la pénombre qui cache le mystère, ça fonctionnait à plein régime. Sur disque? Même chose. Parce que cette fois ci, toutes les conditions sont requises. Et allons y, enterrons le débat, Pylon n'offre rien de plus que ses deux autres volumes accolés, il est pareil, tout en étant différent. Mais quand le JOKE a t'il sorti deux albums semblables?

Jamais. 

On dit souvent que les BEATLES, ou le VELVET ont toujours été les groupes les plus influents de l'histoire de la musique. Niveau Pop et Rock, c'est indéniable. Mais si l'on devait remettre la Palme d'Or rouillée de la plus grosse propagation d'effluves contaminantes dans le petit monde du Métal, de la Cold Wave, ou de l'Indus, gageons que Jaz et Youth viendraient la chercher sur le podium hilares. Attendez, qui peut les remercier au passage? Prong, Metallica, Helmet, Faith No More, Soundgarden, Fear Factory, Nine Inch Nails, Richard Patrick, et puis j'arrête là sinon ça va prendre toute la chronique, et il faut bien garder un pied dans le présent concret.

Absolute Dissident posait les bases, MMXII plaquait les parois, Pylon s'occupe du reste, et finalement, le manoir est debout, sombre, perdu dans une espèce de lande industrielle, et le triptyque résume en gros toute la carrière du JOKE, du séminal album éponyme aux années 2000, en passant par Pandemonium et même Brighter Than A Thousand Suns. Indus, Dance, Métal, Electro, Pylon est tout ça, danse, chante, incante/décante, et aligne les rythmiques qui font baver les autres, et Jaz...survole, comme un corbeau. 

Alors, qu'est ce qui frappe à la première écoute, qu'est ce qui se confirme à la seconde, et qu'est ce qui perdure à la cinquantième?

Comme d'habitude, l'ambiance, taillée dans le froid et les séances d'hypnose, et la première grosse claque est sans conteste "New Cold War", qui doit faire rougir de honte Tommy Victor. Parce que cette rythmique élastique, dance et robotique, il a couru après toute sa vie, en tentant même de singer les intonations vocales de Coleman sans jamais y arriver. Et pourtant, il a réussi à torcher de grands morceaux lui aussi, mais le niveau n'est...simplement pas le même. Ici, tout coule, roule, s'assemble sans efforts, comme une mécanique qu'aucun grain de sable ne pourrait enrayer, même ceux que Jaz a ramené avec lui de son escapade au Sahara il y a trois ans. 

On remarque aussi que le seul morceau à ne pas passer la barre des cinq minutes, "Euphoria" s'amuse bien à retrouver le climat austère MAIS groove Rock des années 80. Certes, c'est du simple et prêt à écouter, mais ça passe comme un souvenir devant la fenêtre, et puis la voix de Jaz fait le reste, en profitant d'un plan rythmique sobre et simple, comme un binaire à la sauce JOKE. La voix de Jaz, parlons en, puisque c'est le point d'attraction, sans même parler de son regard, hors sujet ici. C'est elle qui porte sur ses cordes la longue incantation "New Jerusalem", qui pendant plus de six minutes ne dévie pas de son plan de vol, et laisse des percussions tribales dessiner un décor un peu sec et décharné, pendant que le chanteur se laisse aller et porter de bout en bout....Le riff est unique, économe à l'extrême, presque décalcifié mais il est bien là, comme un métronome, et puis il faut bien laisser les autres faire le gros du boulot parfois... 

"I Am The Virus" au contraire retrouve les boucles de basse d'antan, elle qui s'est si souvent imposé, avec bonheur, comme le pivot de la plupart des morceaux les plus intenses. Ici, elle tourne, vire, se fixe sur trois ou quatre notes qui reviennent comme un mantra glissant, pendant que les guitares laminent le fond, se laissant même partir sur des dissonances. Morceau le plus "emphatique" du lot, il fonctionne pourtant comme un gros Rock Indus humble, et se contente d'impressionner par son volume sonore et ses couches qui s'empilent, rappelant la grande époque de PandemoniumL'ouverture "Autonomous Zone" a aussi droit à sa place à la une, pour des raisons radicalement différentes. Débutant comme une énième variation Electro/Indus, elle finit par se caler sur un up tempo musclé, épaissi par des riffs à la KMFDM, autre groupe qui paie depuis longtemps son tribut au JOKE. Ça cavale sans se poser de questions, ça sème quelques arrangements sonores, mais c'est un uppercut déguisé en mouton qui offre une entrée en matière claire mais pas nette. 

Ce qui est net par contre, c'est ce final qui ne dévie pas d'un iota. Entre deux eaux, Métal sans l'être, Cold Indus sans l'être non plus, c'est sans doute le morceau qui justifie le mieux cette dénomination bizarre de "Tension Rock" que le quatuor affectionne tant. C'est en effet tendu comme un lien entre un passé si glorieux qu'il est difficile à assumer, et un avenir qu'on attend toujours avec la même impatience. Mais Pylon, c'est le présent, et même déjà le passé selon les critères temporels du JOKE. Et le passé, s'ils piochent dedans puisqu'ils le SONT, ne les intéresse pas plus que ça. 

Alors, à la centième écoute, qu'est ce qui restera de ce nouvel album? La même chose que lors de la première. Pas de grosses surprises, c'est une continuité et une fin de chapitre logique, mais c'est toujours à la hauteur des attentes exceptionnelles d'un public d'amoureux transis. C'est énorme et léger à la fois, ça colle la trouille mais ça donne quand même envie d'aller sur la piste, ça fonctionne comme une rave miniature qu'on a dans la tête, et surtout, ça ne se compare à rien, même pas à leurs anciens albums, et surtout pas à leur histoire. C'est un album du JOKE, parmi les meilleurs de la dernière période, peut être pas tout à fait à hauteur d'épaule de Pandemonium, et surtout à ne pas placer de biais par rapport à Killing Joke. 

Le JOKE 2015? Un rictus grinçant et dansant. Mais par dessous tout, une légende qui vit. Et qui assomme la concurrence au passage, sonnant plus jeune et plus frais que n'importe qui.

 



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