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Metal and Oddities Reviews
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9 mars 2016

LUNGLUST - Repetition Is Hell

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War Fever Records - Dirty Hardcore - USA - 4 Mars 2016 - 8 titres – 28 minutes

La scène de Boston n’en finira donc jamais de renaître, depuis les années 80. Après avoir abrité une frange historique du mouvement Hardcore il y a plus de trente ans, elle en incarne toujours un symbole vivace qui se renouvelle sans cesse, tout en ayant élargi son spectre d’action. C’est manifeste dans les faits, et admirable dans le fond. 

Preuve nous en est encore donnée aujourd’hui via la sortie du nouvel effort d’un de ses poulains, et pas forcément le plus affable et présentable. Ce poulain s’est extrait du placenta dans le Massachussetts aux alentours de 2010, et depuis, force l’admiration de ses pairs, pour sa fougue, sa présence sur la piste, et sa capacité à assimiler les diverses techniques de pointe tout en restant fidèle aux entrainements de base. Après un premier EP paru la même année, ils patienteront encore trois ans avant de proposer leur première vraie course, As Guilt Collects Dust, qui les vit passer la ligne d’arrivée bien placés.

Et c’est donc encore trois années supplémentaires qui auront été nécessaires pour donner une suite à ce sprint…Mais après écoute, il n’est pas difficile de comprendre pourquoi ce laps de temps fut indispensable à une bonne préparation…Si le Hardcore Bostonien d’origine était plutôt du genre positif et ouvert, celui de 2016 est sale, sombre, et peu propice à une quelconque empathie de message. Les temps sont durs, la planète va mal, et LUNGLUST ne tient pas à édulcorer la vérité, mais bien à la présenter telle quelle. 

Dirty Hardcore? Oui, on peut parler de ça en effet, sans chercher l’effet de manchette, car le Hardcore de LUNGLUST l’est vraiment. Il est surtout bruyant, grave, parfois à l’orée d’un Crust en bourbier, du D-Beat sournois, voire dans ses impulsions les plus terminales légèrement Grind, à tendance Indus compact. 

Non, le quintette (Jeff Sykes, Eric Lee, Nicholas Wolf, Reid Calkin et Bradford Macomber) ne s’est pas inspiré des JERRY’S KIDS pour préparer leur course, qui finalement, s’apparente au demi-fond. Les cinq musiciens n’ont pas pioché dans l’héritage de leur propre histoire pour dessiner la leur, quoiqu’ils soient restés focalisé sur leur état d’origine, le Massachussetts. Mais c’est bien du côté de SIEGE qu’il faut chercher leur role model, qui fut aussi celui de NAPALM DEATH, en partie, il y a quelques années. Tel parrainage ne peut se galvauder, et Repetition Is Hell assume cette filiation avec toute la gravité nécessaire. Ce que vous allez écouter ne sera ni agréable, ni facile, encore moins apaisant, mais dérangeant, irritant, assourdissant. Et surtout, réaliste. Alors tendez l’oreille, à vos propres risques et périls, pour une plongée dans une réalité qui ne vous plaira pas forcément. 

Si Jeff Sykes, le chanteur, admet que le Hip Hop underground a pris la révolte du Punk à bras le corps, ne vous attendez pas pour autant à une ouverture vers les phrasé groovy des NWA et autres ONYX. LUNGLUST est résolument Hardcore, et préfère les exactions sourdes du Crust chaotique pour exprimer ses vues, et utilise des guitares à la gravité extrême, une rythmique en coup du lapin, et des lignes de chant rauques et presque Death dans l’esprit. 

« La répétition, c’est l’enfer ». Et leur Dante à eux évolue dans ces structures qui se répètent justement, jusqu’à l’overdose parfois, mais qu’ils parviennent à moduler suffisamment pour ne pas le laisser sombrer dans les turpitudes de l’ennui. Puissant mais diffus, percutant mais sourd, ce second album des Bostoniens confirme leur tendance à la brutalité outrancière et à la malséance musicale. En utilisant des riffs qui auraient très bien pu embourber encore plus les trajectoires des premiers combos de Death, mais en les modifiant de quelques harmonies totalement Hardcore, le quintette dessine des lendemains encore plus malsains qu’une dépression sans fin.

Et même si la plupart de leurs morceaux ne jouent pas vraiment les prolongations, eut égard à une direction claire et lapidaire, lorsque la barre des cinq minutes est franchie, le résultat n’est ni redondant ni fatigant, mais bien épuisant, comme le démontre le glaçant « Arrows », et son leitmotiv central hurlé de plusieurs voix collégiales vomissant un « Repetition is Hell » qui glace les sangs. 

Comme un sale Anarcho Core qui aurait dégénéré en Crust Scandinave, Repetition Is Hell construit un pont entre la tradition bruitiste Anglaise de la fin des 80’s et la révolte supersonique Scandinave des années 2000, et traduit en bruit la douleur de la vie. D’un mid tempo maltraité par un ChaoticCore (« Broken Idol »), à un Sludge malsain et empêtré dans ses obsessions qui recycle le Hardcore des débuts (« American Debt »), en passant par une descente aux enfers presque Black et Downtempo (« Godless State »), LUNGLUST fait le tour de la question extrême sans passer par la même case deux fois d’affilée, et sans pourtant renier son principe de révolution autour d’un axe unique. 

Et puisque j’affectionne les statement, je l’affirme haut et fort. Repetition Is Hell est sans doute le plus bel hommage à la scène de Boston qu’on ait pu rendre depuis des décennies, qui reste ancré dans cette tradition anti establishment, tout en renouvelant le medium d’expression de cette haine farouche des institutions et des injustices flagrantes. Hardcore par essence, Crust par envie, terrassant par conséquence, et assassin par nécessité. Un album d’une puissance, d’une lourdeur, d’une vitesse et d’une urgence incroyables, qui n’a qu’une seule idée en tête, vous faire souffrir, pour vous ouvrir à la crudité d’un monde sans pitié. 

Boston. Ici et pas ailleurs, hier et maintenant. Et si la répétition est un hiver sans fin, ne comptez pas sur LUNGLUST pour chanter l’arrivée du printemps. Car pour eux, le soleil des illusions est mort depuis longtemps.   

 

 

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