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Metal and Oddities Reviews
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22 mai 2016

GORGON - Titanomachy

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EpicSymphonic Death Metal - France - 21 Mai 2016 - 8 titres – 40 minutes

Epic Symphonic Death Metal. 

En quatre termes, les Parisiens de GORGON ont déjà tout fait sans le savoir pour que je m’éloigne d’eux. D’une parce que je fuis sans réfléchir tout ce qui porte l’estampille « Symphonique ». C’est généralement pour moi un synonyme de « pompeux », « creux », et « prétentieux ». De deux, l’épique, comme l’Heroic-Fantasy, c’est ma Némésis, mon cauchemar. De trois, je ne suis pas un gros fan de Death, estimant que le genre tourne en rond depuis le milieu des années 90, et le lifting offert par la scène Scandinave.

Donc, l’affaire se goupillait mal.

Pourquoi insister me direz-vous très justement ? Parce que je suis borné, et parce que quelque chose m’intriguait dans tout ça. Et puis surtout, parce que le groupe est Français, et comme tout chroniqueur qui se respecte, je m’intéresse aux groupes nationaux. Sans les cajoler non plus, mais j’estime que c’est un devoir intrinsèque pour tout webzine frenchy qui se respecte de parler d’eux. 

Et vous savez quoi ? J’ai bien fait de me montrer têtu et de passer outre mes préjugés. Car ce premier album du quatuor GORGON est une tuerie intégrale, qui pourtant devrait incarner l’exemple parfait de mes allergies musicales.

 

Qu’en est-il de son contenu ? Conceptuellement, puisque c’est une donnée importante dans son cas, Titanomachy trouve son essence dans la mythologie Grecque, et les affrontements entre Dieux et Olympiens. Plus précisément, les pistes de cet album décrivent le conflit opposant Zeus et Cronos, qui d’une manière sous-jacente illustre « la bataille que chacun de nous doit affronter pour être plus fort, plus sage, plus intelligent que les anciennes générations ». Eut égard à l’attitude globale de l’humanité, je dirais que le pari est perdu d’avance. Ce qui n’empêche nullement Titanomachy de nous narrer les dix années de guerre qui ont précédé l’origine de l’humanité. Et c’est peu dire que ce préambule annonçait déjà des siècles de violence outrancière et aveugle. 

Difficile d’illustrer en musique un tel épisode de la mythologie sans tomber dans l’emphase…Mais comme GORGON a fait le choix de s’adapter en musique à sa thématique, le problème ne se pose pas. A vrai dire, les Parisiens ne se sont rien refusé, ont multiplié les arrangements épiques, les orchestrations grandiloquentes, et ont tissé une trame Death progressive pour soutenir le tout. Tout ça pour obtenir ce fameux Epic Symphonic Death Metal qu’ils proclament jouer, et qui reflète exactement leur façon de composer. Nous avons donc affaire à un combo honnête qui ne cache en rien ses aspirations, et c’est une chose appréciable dans ce monde de faux semblants.

 

Musicalement la première analogie qui m’a frappé, est celle que j’ai pu établir avec le EMPEROR le plus maniéré et sophistiqué dans la tempête. Bien sûr, GORGON n’a aucun rapport avec le BM, et colle à une esthétique Death jusqu’au bout, mais cette façon d’équilibrer les partitions symphoniques et les bourrasques rythmiques est symptomatique des progressions qu’on retrouvait sur le chef d’œuvre Anthems To The Welkin At Dusk  d’Insahn & co. Ceci étant dit, GORGON n’a pas vraiment besoin de comparaisons pour exister en tant qu’entité viable. Leur Death est éminemment puissant évidemment, refuse toute forme de sobriété, mais ne tombe jamais dans la démonstration déplacée gratuite. Le quatuor a travaillé ses ambiances en profondeur, et sa musique évoque à merveille ce concept de guerre divine dans toute sa démesure, et vous envoute dès l’intro, pour ne plus vous lâcher et permettre de regagner votre réalité.

C’est un voyage troublant et enivrant, qui se repose sur un principe pas si simple qu’il n’en a l’air, et qui réclame une précision et une science de la composition exacte. Et donc, quelque chose qui n’est pas accessible au premier venu.

 

Impossible de détailler les pistes à la volée, puisqu’elles forment un tout, mais sachez que si la référence à EMPEROR est troublante, on peut aussi en dresser une avec les évidents FLESHGOD APOCALYPSE sans manquer de respect à GORGON.

Epique, sans conteste, symphonique, indéniablement, mais au-delà de ces qualificatifs, il est relativement aisé de voir en cette suite une retranscription en musique d’une bataille qui a duré une décennie, via un genre de War Metal très efficace, qui sait glisser dans nos oreilles chaque étape de la confrontation. Si certaines pistes jouent la violence sans limites, multipliant les parties de double et les riffs incendiaires, d’autres adoptent la nuance, et introduisent des instrumentations excentrées à base de Bouzouki, et de plages évolutives harmoniques. En gros, non seulement le groupe a trouvé la balance entre orchestrations et Metal sauvage, mais aussi entre agressivité et progression subtile. Titanomachy a été composé comme on rédige le scenario d’un film à gros budget, avec beaucoup d’intelligence pour ne pas noyer l’auditeur sous un déluge de sang et d’acier. Pari relevé, pari gagné. Bravo. 

Alors oui, on sent dans les morceaux toute la colère et la puissance des Dieux et des Titans qui s’affrontent, avec ces chocs violents, ces regards de biais, ces stratégies, et on se laisse porter de l’intro au final sans se poser de questions inutiles.

Le groupe a en outre eu la pertinence de bien doser ses segments, pour finir par une piste orgiaque de plus de dix minutes qui porte tous les éléments à leur paroxysme.

« Elysium », même au regard de la qualité intrinsèque de toutes les pistes qui l’ont précédé, peut facilement se voir comme le point d’orgue de ce premier album ambitieux. Intro emphatique et dramatique, digne de la BO d’un 300, entame mélodique mais appuyée, développement en mid tempo qui frise en plus d’une occasion le BM symphonique, avant que le Death mélodique et épique ne reprenne ses droits. La construction dite « progressive » est une fois de plus un modèle de finesse et de précision, et nous emporte dans un crescendo de fureur, tout en laissant place à une certaine part d’émotion qui s’incarne autour d’harmonies grandiloquentes. 

Difficile de croire que les Parisiens signent avec Titanomachy leur premier album. On frise en plus d’une occurrence la perfection dans un style qui ne supporte ni la médiocrité ni la timidité, et jamais GORGON ne tombe dans le ridicule tout en assumant son côté excessif.

On pourrait presque leur accorder la paternité d’un nouveau style, le Titanic Metal, qu’on écoute à l’ombre de géants de pierre et de chair.

 

Et d’ailleurs, je franchis le pas. Après tout, ils le méritent amplement. 

 

 

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