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Metal and Oddities Reviews
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4 septembre 2015

ANOPHELI - The Ache Of Want

a3949128027_10Halo Of Flies Records - String Crust Core - USA - 2 Juillet 2015 - 6 Titres, 40 Minutes

Lorsque par hasard, vous tombez sur un groupe d'Emo (sic) Crust, et qu'en jetant un coup d'oeil au line up, vous tombez sur ceci:

Nicole - Violoncelle; Josh - Batterie et Chant; Peter - Guitare & Basse; Brian - Guitare & Basse; Alex - Chant / Concept / Textes; Richard - Guitare acoustique; Lacy - Chant; Anna - Chant

Alors vous savez que vous avez déniché quelque chose de...différent. Et ANOPHELI l'est, sans conteste. Formé à Oakland en Californie à l'orée de 2014, ce septette se compose de membres de Light Bearer, Fall Of Efrafa, Carnist, et Monuments Collapse. Après avoir sorti un EP en avril de l'année dernière, A Hunger Rarely Sated, les Américains remettent le couvert en développant leur concept bien plus largement. Et le résultat est étonnant à bien des points de vue. Sur une base résolument Crust et Core, les sept musiciens tissent une trame classique qui s'intègre parfaitement à la violence ambiante, un peu comme si ELEND travaillait avec un groupe de Crust contemporain pour dynamiser ses trémolos tragiques. Le mélange des voix féminines et masculines, dans sa dualité apporte une touche supplémentaire de surprise à ce LP qui n'en finira pas de vous troubler....

Quelle drôle d'idée quand même d'intégrer une trame classique à une base farouchement agressive. Certes, l'expérience a déjà été tentée à mainte reprises, mais jamais sur un terreau aussi radical et farouchement lapidaire à la base. Même si le Black ne rechigne pas à utiliser certains arrangements symphoniques, rarement le Hardcore aura bénéficié d'un tel traitement harmonique. Et il n'est pas question ici de vague superposition de strates symphoniques jouées au synthé, mais bien de cordes réelles et vibrantes, qui adoucissent les morceaux sans les dénaturer. Mais après tout, est il encore besoin de démontrer que le classique est sans aucun doute la musique la plus puissante jamais créée?

Six morceaux, dont les deux tiers dépassent les sept minutes, ça laisse le temps à ANOPHELI de développer ses théories.

Deux exceptions confirment la règle, "Squanderer" qui se contente d'un cahier des charges Crust (désolé, mais même si le groupe y tient, je ne peux me résoudre à y accoler le terme "Emo" que j'abhorre), et qui n'est que violence et bourrasques torrides, et "Ruminations" qui prend lui le chemin inverse, et se concentre sur l'acoustique, avec violoncelle, guitare classique et violons. La juxtaposition des deux morceaux, placés en plein centre de l'effort est d'ailleurs très judicieuse, et coupe The Ache Of Want en son milieu, comme une césure à l'hémistiche, et donne à l'album des allures de sonnet, voire de compliment amoureux/haineux un peu déviant et dénaturé.

Mais loin de se contenter d'une structure de base à appliquer systématiquement, ANOPHELI fonctionne un peu comme NEUROSIS, et garde une ambiance générale qu'ils travaillent de plusieurs façons. Le jeu peut parfois consister à enchaîner les parties classiques avec les foulées brutales, sans transition ("Awoken"), à les faire évoluer en parallèle, multipliant les points de convergence, et teintant la violence crue d'une touche de lumière nostalgique ("Acts Of Man"), en décalquant justement les modèles de progression de la bande à Scott Kelly, cordes et percussions en avant ("Somnambulant", qu'on aurait facilement pu trouver dans sa première partie sur Enemy Of The Sun ou Souls at Zero), ou en synthétisant toutes ces solutions au sein d'une même suite, longue, majestueuse, ample et explosive à la fois (le final "Trade", en forme de triptyque, Crust, puis Darkcore symphonique, puis purement harmonieux en velouté de cordes rythmique sur sa fin).

Outre cette utilisation hors norme d'instrumentalisation atypique, la base Métal du septette s'accommode de bien des courants, et pioche allègrement dans le Darkcore, le Crust, le Néo, le Doom, en étant à l'aise dans chacun des secteurs ou en les mixant avec flair et équilibre. Cette force, une fois couplée avec ce choix d'union contre nature avec l'univers classique baroque, est aussi de ne pas dénaturer la violence en l'étalant d'une façon très pure et rauque,  ni d'utiliser les codes que d'une façon superficielle et presque en état de gimmick. The Ache Of Want fait preuve d'un travail énorme d'intégration, transpire le désespoir et la nostalgie amère, sans en faire trop, et en restant d'une sincérité troublante. La tonalité générale de cet album est bien sur sombre, puisque même le travail sur les cordes n'apporte que peu de lumière, mais il s'en dégage une beauté indéniablement trouble, accentuée par la complémentarité des musiciens qui jouent ensemble, et non chacun de leur côté...

Alors oui, les accents à la NEUROSIS sont bien sur assez forts, mais ressortent d'une manière assez fascinante. Comme si les débuts Anarcho Core des Américains avaient été fondus dans leurs digressions tribales et viscérales de l'époque Enemy Of The Sun/Through Silver In Blood. Mais cette comparaison n'enlève rien à l'identité très affirmée d'ANOPHELI, qui n'a pas forcément besoin de références pour exister par lui même.

Une musique funèbre, chaotique, pure, qui ménage des moments de grâce pure et d'agression sans concessions, lourde, légère, emphatique, spontanée...et surtout, créative.

Belle découverte que cet album atypique par bien des points, qui mérite une attention particulière, et qui prouve que les opposés s'attirent, et se complètent parfois avec une magie insoupçonnable. Emouvante, c'est le mot. Dans son sens premier de provocation d'émotions. Mais découvrez vous même de quel façon The Ache Of Want vous touchera.

La surprise reste quand même le fondement de toute découverte.

 

 

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