THE SHIVA HYPOTHESIS - Demo 2015

Progressive Black - Pays Bas - 27 Juin 2015 - 3 titres – 20 minutes 

Vous n'êtes pas censé ignorer que si nous sommes là aujourd'hui, vivant sur cette forme, sur cette terre, c'est qu'avant nous, des millions d'années d'évolution ont été nécessaires. Cette évolution, pour le meilleur ou le pire selon les avis, a aussi entraîné la disparition massive de formes de vies antérieures, que l'on a dénommé périodes d'extinction massives. Il y en a eu plusieurs, et leur explication a été sujette à diverses interprétations. 

L'une d'entre elles a été baptisée du nom de la divinité Hindou de la destruction, Shiva. Nos amis anglophones la décrivent comme étant l'Hypothèse Shiva, qui en vulgarisant à outrance ses dérivés scientifiques repose sur la croyance que le système solaire, en traversant la voie lactée, subit des perturbations gravitationnelles, qui perturbent un système de comètes, découlant sur des chocs possibles troublant l'équilibre de la vie sur Terre. C'est une théorie de chaos/création comme une autre, qui à le mérite d'avoir inspiré un quatuor Hollandais qui s'est basé sur ces préceptes pour proposer une musique illustrant à merveille le concept de création/destruction. 

Au départ instrumental, le projet s'est vite vu enrichi d'un vocaliste qui a commencé à broder des textes sur la trame instrumentale de ML (basse, claviers, choeurs), JB (guitare) et BN (batterie), pour finalement permettre au groupe de proposer une démo de grande qualité que j'ai découverte aujourd'hui, et qui m'a sincèrement emballé. 

Affirmons sans ambages que THE SHIVA HYPOTHESIS a parfaitement réussi à transposer les effets matériels de la théorie qu'ils veulent illustrer, en provoquant une énorme collision entre un Black Métal farouchement violent et un Death puissant et moderne, le tout sous couvert de développements progressifs. Ils citent volontiers quelques références notables, de BEHEMOTH (les plus viables) à IMMORTAL, en passant par DEATH ou EMPEROR, mais après écoute attentive de ces trois morceaux, on pourrait aussi évoquer à leur encontre MESHUGGAH, STRAPPING YOUNG LAD, et beaucoup d'autres formations ayant érigé la violence et la précision comme motivations suprêmes. 

Cette démo ne prend d'ailleurs même pas la peine de se laisser traîner le long d'une intro quelconque, et nous fait pénétrer son univers dès son entame "Caduceus", à grands coups de rythmique évolutive et de riffs massifs. Le chant de MvS est très rauque bien sur, et se partage entre growls denses et hurlements suraigus, mais domine bien les parties instrumentales complexes des trois instrumentistes. Ces parties instrumentales sont très riches mais surtout d'une épaisseur contextuelle impressionnante, un peu comme un choc frontal entre les mondes terrifiants d'EMPEROR et du STRAPPING YOUNG LAD de City. Les plans se succèdent en s'enchaînant avec une belle fluidité, mais THE SHIVA HYPOTHESIS sait aussi ménager quelques instants de quiétude. Dans ces moments là, leur musique devient légèrement contemplative, sans perdre de son impact, et se place plus volontiers sous une lune orbitale Black progressive. Les guitares entrent alors dans un ballet de dissonances/harmonies envoûtant, et le chant se dédouble en des volutes schizophréniques. 

Les trois morceaux de cette démo/promo kit sont de qualité égale, même si le dernier segment, "Maze Of Delusion" s'offre une belle tribune avec ses neuf minutes de dédale rythmique complexe et pénétrant. Si la précision semble être une obsession, elle ne détourne pas pour autant les musiciens de leur but initial. On visualise parfaitement à l'écoute de leur musique un système qui évolue selon des codes stricts mais des trajectoires mouvantes, et l'équilibre entre ce Black épique et presque symphonique et ce Death technique et radical est totalement en phase avec les thématiques. Quelques riffs purement Heavy ou Thrash viennent pimenter le tout et lui offrir une stabilité de surface, qui rappelle les exactions de NOCTURNUS ou même de NILE par instants, mais ces mêmes parties sont souvent enchaînées à des accélérations foudroyantes percutant elles mêmes frontalement des breaks inextricables où les mesures impaires se frottent à des parties de riffs chancelants. 

Brutal mais mélodique, dense mais ne laissant s'échapper aucun détail, cette première démo présente un groupe diablement en phase, qui se permet même de citer le vieux MAYHEM sur quelques interventions un peu plus glauques que la moyenne, et au final, on a le sentiment de faire face à une rencontre brutale entre le MARDUK le plus agressif et le MESHUGGAH le moins labyrinthique. Force, cohésion, mélodie, complexité, outrance, THE SHIVA HYPOTHESIS a assimilé tous les concepts pouvant enrichir son optique, et propose des pistes qui mériteront d'être approfondies lors d'un longue durée qu'on espère proche, et qui saura proposer un nombre d'idées conséquent. 

En attendant, vous pouvez vous repaître de ces trois morceaux qui à eux seuls étalent plus de créativité et d'efficacité que bon nombre d'autres formations affirmées. On pourrait même extrapoler dans un délire de vulgarisation scientifique, et affirmer que la musique des Hollandais pourrait elle aussi être responsable de mouvements stellaires, et penser qu'un jour, elle pourrait causer une énième extinction de masse.

Ce qui ne serait qu'une hypothèse de plus à ajouter à l'héritage de Shiva, qui doit se réjouir de voir son nom accolé à tant d'intérêt philosophique, scientifique et musical.