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Metal and Oddities Reviews
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22 février 2016

SEVENTH - The Herald

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Slipstrick Records - SludgyPost Hardcore  - Italie - 18 Janvier 2016 - 7 titres – 44 minutes 

Un héraut ou héraut d'armes est un officier de l'office d'armes, chargé de faire certaines publications solennelles ou de porter des messages importants. 

Ceci étant dit, pourquoi et comment? 

Tout simplement parce que c'est le titre du premier album des Italiens de SEVENTH. Il convenait alors de vous rappeler la définition même de ce nom et des obligations qui en découlent, puisque ces originaires de Venise ont cru bon de l'utiliser comme intitulé de leur premier LP, ce qui n'est jamais gratuit. Formé en 2014, le quintette SEVENTH est axé autour de deux personnalités, celle de Maximilian Goldberg et Marco Tumiatti, qui se sont occupés de tout sur ce The Herald, mis à part l'enregistrement de la batterie, prise en charge par Francesco Begotti de ZEIT. Et autant dire que les deux multi instrumentistes/compositeurs sont doués et disciplinés. Car leur première oeuvre échappe presque à toute catégorisation dans son désir d'innovation, et c'est une chose tellement rare qu'elle méritait largement d'être soulignée, et appréciée en tant que telle. 

The Herald a vu sa conception débuter en juin 2014, lorsque Maximilian et Marco sont entrés au Putrefashion Empire Studio de Lendinara. L'album a été produit par leurs soins, avec le maître d'oeuvre local Pablo Davilla, et mixé au Hate Studio par Luca Spigato. En au delà de toutes ces considérations techniques, indispensables cela dit, il faut avouer que toute l'équipe à abattu un travail phénoménal pour transformer ce premier jet en LP foncièrement original et envoûtant...La trame narrative de The Herald repose sur l'intérêt de ses auteurs pour le travail de Milton (Le Paradis Perdu) et T.S Eliot (La Terre Vaine), mais aussi pour la philosophie de Nietzsche et Stirner. Les références sont connues, et d'autres groupes avant eux s'en sont servi, que ce soit PARADISE LOST justement, mais aussi la scène BM, et évidemment les crétins de MANOWAR qui eux n'en avait retenu que les aspects "surhomme" de surface. Ici, l'analyse est bien plus poussée et moins artificielle. Le personnage principal de cette histoire est un homme comme les autres, prenant conscience de sa condition humaine, et qui de fait se sent renaître, plus libre de choisir son destin funeste, par lui même et ses propres capacités cognitives et émotionnelles. En gros, la réalité de la futilité de l'existence, le libre arbitre, et la différence entre la prédestination et le choix des faits une fois confronté à la réalité. Le thème est d'usage, mais ce qui l'est beaucoup moins, c'est la façon qu'on eut les deux Italiens de le traiter. 

Car musicalement, l'affaire est beaucoup plus complexe. The Herald se pose en tragédie Grecque moderne, avec son lot de traumas, de questions, de remises en cause, et se retrouve mis en forme d'une approche très originale dans le fond et la forme, même si les éléments usités sont aussi connus. Tout ceci aboutit à l'émergence d'un style à cheval sur plusieurs genres, qui emprunte la liberté de ton et l'agressivité du Post Hardcore sans tomber dans ses travers les plus complaisants et contemplatifs, la crudité du Death métal bridé dans un contexte progressif, mais aussi l'harmonie déviante du Post Rock qui rappelle la période intermédiaire de PARADISE LOST, pas encore muté de Icon à One Second. 

Tout ceci bouillonne, étonne, mais surtout séduit. En optant pour une ambivalence de ton, SEVENTH est parvenu à trouver un équilibre très stable entre sensibilité et crudité, et ouvre des pistes très intéressantes. Les sept pistes de ce premier LP sont toutes d'une cohérence absolue, et font preuve d'une imagination assez admirable, distillant les montées d'adrénaline avec flair en les confrontant à des segments très harmonieux et sombres, ce qui rend leur écoute captivante. Pourtant les morceaux sont longs, très longs parfois. Presque huit minutes pour le majestueux "The Exile", qui développe une jolie arrogance Post Metal truffée de références Death, et presque Sludge parfois dans cette lourdeur oppressante.

Il faut dire que le duo ne s'est en aucun cas bridé, sans pour autant tomber dans la complaisance d'idées futiles et de développements superfétatoires. La redondance ne guette jamais, et alors qu'on pense avoir saisi le sens global d'une composition, les deux compères nous entraînent sur de fausses pistes qui nous révèlent en fait une issue pas forcément prévisible durant les premières minutes. 

Le cheminement de l'album suit le parcours de cet homme qui s'affranchit enfin des dogmes, et des carcans moraux de la religion, pour enfin trouver la liberté absolue à laquelle il aspire. Et cet affranchissement vers une liberté individuelle est parfaitement retranscrit musicalement, grâce à une progression de ton qui nous fait passer de la violence crue de "The Apostate" encore très emprunt de la puissance du Post Hardcore, à "The Throne", qui joue sur la pesanteur et l'oppression du Sludge/Doom sombre et cathartique. D'ailleurs, ce combat moral est parfois concrétisé par un morceau en solitaire, comme le démontre le fabuleux "The Monarch", qui rappelle les heures les plus créatives de NEUROSIS ou LIGHTNING BOLT. Montée de ton progressive qui s'achève dans un quasi silence à peine dérangé par quelques arrangements sonores, vocaux évolutifs qui passent d'une fausse douceur introspective à une litanie de rage totale... 

Le travail des arrangements est d'ailleurs à souligner tant il enrichit l'oeuvre sans jamais paraître déplacé et encore moins gratuit. Les Italiens ont parfaitement négocié les transitions entre les morceaux, ce qui apporte à l'ensemble une cohésion parfaite. Du coup, The Seventh se suit comme une aventure humaine et musicale fascinante, qui parfois passe par des moments de pureté presque religieuse ("The Dawn"), ou au contraire par une hérésie totalement frénétique ("The Desert").

C'est en tout cas terriblement convaincant, ciselé comme le travail d'une vie, et pour un départ, c'est l'annonce tonitruante d'un avenir qu'on pressent déjà diablement créatif. 

Coup d'essai pour un coup de maître, dans un créneau pourtant surchargé, ce qui accentue encore plus le talent d'un groupe qui se place dès sa découverte sous des auspices novateurs. Et finalement, en choisissant de ne pas choisir, SEVENTH s'est affranchi des codes en vigueur dans le Post Hardcore, et ce messager qu'ils nous introduisent nous apporte en fin de compte la nouvelle d'une naissance qu'il convient de fêter comme il se doit. 

 

 

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