LUDICROUS - The Stoic Ideal

Industrial Death - Finlande - 13 Avril 2016 - 8 titres – 31 minutes

« The talk is over. The time is now. The Stoic Ideal is alive. Written and conceived under a very strange period in life, there are very few words left to say. Live thru it with us. Breathe. It's there for you to experience. » 

Ça n’est pas moi qui le dit, mais eux. Eux ? Les Finlandais de LUDICROUS, qui sortent au mois d’avril leur deuxième LP, The Stoic Ideal. Selon eux, il n’y a plus grand-chose à dire. C’est dommage.

Parce que j’avais deux trois trucs à préciser sur eux avant de rendre l’antenne. Allez, je prends des libertés et passe outre leurs recommandations. 

Les LUDICROUS se sont formés en 2013, et ont publié leur premier album l’année suivante, Altar Boy Discocult. Constitué de membres d’END OF YOU, DEAD SHAPE FIGURE et GAF, ils s’adonnent aux plaisirs du Death à forte connotation industrielle, et ils le font bien. Très bien même. On pense à beaucoup de choses en écoutant leur musique, et en l’espace de quelques morceaux, les noms de FEAR FACTORY, CREMATORY et STRAPPING YOUNG LAD ont effleuré mon cerveau, en tout cas ce qu’il en reste, mais néanmoins, aussi justifiées soient ces références, les Finlandais possèdent leur propre son, qui selon un euphémisme consacré, « décoiffe ».

En plus, ils ont le sens de l’humour et de la citation hors contexte.

Ainsi, en plein milieu de l’album, vous tomberez sur une reprise assez étonnante de nos chers amis masqués de SLIPKNOT, puisque leur hymne « Duality » s’est frayé un chemin jusqu’à la tracklist définitive…Curieux choix qui témoigne quand même d’une grande ouverture d’esprit…La reprise en question est honnête, mais ne tient absolument pas la comparaison avec le répertoire original du quatuor, quoiqu’elle se fond plutôt bien dans le paysage. Il lui manque pourtant la folie de l’original, et surtout, la voix de Corey qui fait défaut sur le refrain. Mais cette approche grandiloquente et légèrement Indus/Gothique n’est pas pour autant désagréable, et permet d’entrevoir légèrement le spectre musical de nos amis du jour.

Nonobstant ce petit intermède ludique, précisons que The Stoic Ideal est une affaire en tout point sérieuse et solide. D’ailleurs, le groupe entend bien nous le faire comprendre très rapidement, puisque les deux premiers morceaux font tout le boulot de persuasion à eux deux.

On commence l’aventure sous les auspices d’un amour paternel un peu « étouffant » il faut l’avouer, puisque « With The Love And Commitment Of A Father » évoque plus volontiers une bonne crise de colère Indus, avec sa rythmique martiale et ses riffs à la FF, saccadés à outrance, qu’un câlin prodigué à sa fifille par son papa. La bande au gros Dino est donc saluée avec hommage, tout comme le STRAPPING YOUNG LAD de City, avec ces passages à la double grosse caisse hyper concentrés que Gene Hoglan n’aurait pas reniés. Arrangements électroniques, majesté, voix d’une délicieuse gravité, nous sommes vite pris dans le tourbillon, et le single « Papilloma Pope » ne change en rien la donne, bien au contraire…

Ils ont beau nous faire le coup de l’intro liturgique en latin, les païens nous assaillent très rapidement avec la même précision, en se permettant cette fois ci quelques passages accélérés, dans une mouvance Death électronique étonnamment percutante. Une fois de plus, un break en blasts avec un chant clair vient nous aiguiller sur la piste FF, avec une petite touche scandinave qui appose son sceau glacial.

Mais les LUDICROUS ne sont pas aussi prévisibles que ces mots le laissent entendre. Ils savent aussi jongler avec un cyber Thrash percutant et plus sauvage, comme le démontre le très véloce «Deathjog », qui se laisse débrider par une rythmique Crust presque Punk, tandis que les guitares se réchauffent enfin pour libérer quelques riffs bien catchy. Refrain mélodique « à la Suédoise », avec ce qu’il faut de Gothique à la TYPE O, c’est une bonne claque qu’on prend avec plaisir et qui casse un peu le moule. 

Si la plupart du temps, les groupes évoluant dans ce créneau se perdent le long de compositions à tiroir un peu monolithiques et longuettes, LUDICROUS a au contraire opté pour des formats courts, qui apportent une dynamique patente à l’album. Ils n’hésitent pas à rester sous la barre des trois minutes pour des morceaux en demi-teinte («Inside Out », mid tempo au riff très accrocheur et Heavy Rock, là pour le coup, on pense sévèrement à une divagation CREMATORY plus vraie que nature…), et savent aussi tenter des choses plus « inclassables » (« Ponyrides And Ceilings », qui ne se fixe que très rarement mais emporte l’auditeur dans sa schizophrénie). En somme, beaucoup de choses intéressantes, d’autant plus que le LP dépasse à peine la demi-heure. L’intérêt reste en éveil jusqu’au final « Delta Male Supremacy », le plus long du lot, qui se fait plaisir en reprenant toutes les idées proposées dans un ballet étourdissant de violence et de grandiloquence. 

Science du riff qui fait mouche, rythmique qui ne reste pas sur la touche, The Stoic Ideal a beau justifier son titre de son rigorisme omniprésent, il sait aussi s’en éloigner pour se montrer plus direct et spontané. Il représente en quelque sorte la quintessence de la gravité du Death, des systématismes pointilleux de l’Indus, du décorum sombre et tape à l’œil du Gothique underground, sans oublier les attaques vicieuses du Thrash, qu’il soit Néo ou pas.

Un excellent second effort pour un groupe qui sait exactement où il va, et qui se permet même quelques clins d’œil bien sentis, via la reprise de SLIPKNOT évidemment, mais aussi des chœurs très « Metalcore de stade » sur « Delta Male Supremacy », qui réveillent l’ado qui sommeille en nous. 

Un album à recommander à tous les fans d’une musique extrêmement compacte et moite mais qui sait ouvrir la fenêtre quand il faut.